Publicité

L'Afrique du Sud provoque une nouvelle polémique sur le traitement du sida

La décision de retirer un antirétroviral du marché souligne l'incohérence de la politique du gouvernement sud-africain en matière de lutte contre le VIH/sida.

«Action de génocide», voilà comment une ONG qualifie la politique du gouvernement sud-africain en matière de lutte contre le sida. Une conférence nationale sur le sida s'est ouverte, dimanche 3 août, à Durban, sur fond de polémique concernant les traitements antirétroviraux. Le gouvernement sud-africain est à cette occasion pointé du doigt par les activistes de la Campagne d'action pour le traitement (TAC), un groupement d'organisations privées et non-gouvernementales pour la lutte contre le sida. Il est notamment reproché au gouvernement sa prise de position sur le problème de la Névirapine et l'absence d'un plan national adéquat de prévention et de traitement pour les personnes atteintes ou ayant développé la maladie.

La polémique fait suite à un avis du Conseil gouvernemental de contrôle des médicaments (CCM) qui a remis en cause l'efficacité du traitement par la Nevirapine pour éviter la transmission du virus à l'embryon. Le CCM fonde son avis sur des «vices de forme» relevés dans une étude conduite en Ouganda démontrant l'efficacité de la Nevirapine. Cette étude ougandaise n'avait en effet pas fait l'objet d'une demande préalable exhaustive de validité auprès de la Food and Drug Administration américaine. La Nevirapine est pourtant un médicament approuvé par les agences onusiennes et l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Son efficacité n'est plus à démontrer puisque son utilisation limite de 50% le risque de transmission du virus du sida à l'enfant.

Cette nouvelle décision vient souligner l'incohérence de la politique du gouvernement sud-africain en matière de lutte contre le VIH/sida. Il y a un an, le président sud-africain Thabo Mbeki considérait les antirétroviraux comme «du poison». La TAC avait alors déposé une plainte contre le gouvernement sud-africain devant la Haute Cour de Pretoria pour le contraindre à accepter la distribution de la Névirapine aux femmes enceintes séropositives. Elle a obtenu gain de cause au mois de décembre 2001. Le 25 mars 2002, la Cour constitutionnelle a débouté une nouvelle fois le gouvernement et a affirmé que «refuser le traitement revient à violer les droits de l'Homme». A l'issue de cette décision, Manto Tshabalala-Msimang, le ministre de la Santé, avait estimé que «le système judiciaire ne peut établir des ordonnances depuis un tribunal» et que «c'est aux autorités médicales de régulation du pays de montrer la voie sur la Névirapine». Il semblerait que le gouvernement veuille donc épuiser tous les recours juridiques possibles avant d'obtempérer.

Le bras de fer autour de la Névirapine n'est pas en passe de se terminer car la TAC a déjà annoncé son intention de mener une nouvelle action en justice contre le gouvernement sud-africain pour qu'il lance une campagne nationale de traitement et de prévention du sida. Des chiffres accablants renforcent la thèse de l'inaction du gouvernement sud-africain.

Selon des statistiques de l'ONU, 360 000 décès directement liés à la pandémie ont été enregistrés en 2001 en Afrique du Sud, soit 986 par jour. Les économistes disent que l'épidémie représente une menace significative pour l'avenir de la nation. L'espérance de vie en Afrique du Sud dans les années 90 était de 59,9 ans. Il est prévu qu'elle chute à 45,2 en 2005.