Hillary Clinton a donné le ton samedi. Lors d’une conférence de presse improvisée en marge de la Conférence de la sécurité de Munich, la secrétaire d’Etat américaine a de nouveau appelé l’ONU à agir « avec force » pour faire cesser les violences en Syrie, tandis que le projet de résolution européen contre le gouvernement de Damas était, lui, rejeté au Conseil de sécurité en raison du veto de la Russie et de la Chine.

Même refrain, encore plus ferme ce dimanche matin. « La pire des choses serait qu’une logique de guerre froide se réinstalle au sein des Nations unies » a déploré le ministre turc des Affaires étrangères Turc Ahmet Davutoglu, dont le pays a pris ses distances avec Damas. « L’attitude russe et chinoise a réduit le rôle du Conseil de sécurité à néant. Il faut trouver un nouveau forum » a pour sa part tonné Kenneth Roth, le directeur de l’organisation Human Rights Watch.

Le moins que l’on puisse dire est que le ministre des Affaires étrangères Russe Serguei Lavrov n’a pas convaincu à Munich où il a, samedi matin, explicité la position russe. L’intéressé a redit qu’il n’était pas question pour Moscou de remettre en cause la souveraineté syrienne, dénonçant le parti-pris de la résolution défendu à l’ONU par les Européens contre le gouvernement de Damas. « Il s’agit d’une guerre civile face à laquelle on demande aux autorités syriennes de désarmer. Ce n’est ni acceptable, ni juste » a argué Serguei Lavrov.

En coulisses de la réunion, les experts russes présents affirment que la Russie - qui dispose d’une base navale en Syrie et continue de livrer des armes au gouvernement - est hantée par la tournure prise par la guerre en Libye après la résolution du Conseil de sécurité autorisant en février 2011 l’emploi de la force pour venir au secours des populations civiles. «La Russie a le sentiment d’avoir été flouée par l’Otan lors de la guerre en Libye. Les Syriens en paient aujourd’hui le prix » concède un diplomate russe. Le vice-ministre des affaires étrangères chinois Zhang Zhijun avait de son côté fermé la porte samedi, lors d’un très vif échange avec le sénateur américain John Mc Cain sur la question du Tibet, faisant une fois de plus du « respect de la souveraineté », le principe essentiel pour Pékin.

Élément révélateur: les discussions de Munich, tout en condamnant la Chine et la Russie pour laisser se poursuivre «le bain de sang » en Syrie, montrent combien la question restera verrouillée à l’ONU, sans ouverture de la part de ces deux pays. « L’engagement de la Ligue arabe en Syrie, et son soutien aux pas des Nations unies sont très importants a affirmé le sénateur américain Joseph Lieberman. C’est maintenant à ce niveau qu’il faut agir. Nous devons réfléchir à ce que nous pourrions faire pour soutenir l’armée de libération syrienne. Je pense qu’il est grand temps de devenir actif ». Interrogé sur l’éventuelle fourniture d’armes aux forces de l’opposition, ce parlementaire influent de Washington n’a rien écarté: « Le peuple syrien fait preuve d’un courage immense et rien ne doit être exclu. La question n’est plus si Assad doit partir mais à quel moment il va partir et nous devons tous y contribuer. Soutien médical, renseignements, voire livraisons d’armes, je n’exclus rien ».

Au nom de la Turquie, pays voisin et couloir de transit naturel pour un possible soutien logistique, Ahmet Davutoglu a réfuté cette possibilité, tout en reconnaissant l’impasse: « Je me suis personnellement rendu de multiples fois à Damas. Je suis resté sept heures assis sur une chaise face au président Assad à Damas et j’ai compris que nous n’obtiendrons rien par nos négociations. Puis nous nous sommes tournés vers la Ligue Arabe, sans succès. Trouver une alternative à l’oppression reste pourtant plus que jamais la question. Notre responsabilité morale en tant que voisins est engagée. Nous accueillerons tous les Syriens qui franchissent nos frontières. Tel est le message que nous devons, de toutes nos forces, continuer de faire passer ».