Le ministre allemand des Affaires étrangères sortant, Joschka Fischer, est, de son propre aveu, «un incorrigible romantique». L'ancien révolutionnaire de Francfort, qui s'était marié pour la première fois à 19 ans, alors que ses camarades de lutte se gaussaient de l'institution bourgeoise du mariage, vient de passer devant Monsieur le maire pour la cinquième fois.
Samedi soir, à Rome, alors que les derniers rayons du soleil embrasaient la Ville éternelle, Fischer, 57 ans, et sa compagne Minu Barati, une étudiante en cinéma de 29 ans, gravissaient, au son de la Petite Musique de nuit de Mozart, les marches du Capitole «pour des circonstances très personnelles», avouait le ministre. Dans la Sala Rossa, tendue de tapis de soie rouge, les deux fiancés ont répondu «si» devant le maire de Rome, Walter Veltroni, un ami du ministre. Le maire a offert à la mariée un bouquet d'orchidées roses et jaunes, tandis que s'élevait la Primavera de Vivaldi.
Une vingtaine d'invités seulement, dont les deux enfants de Fischer, David, 26 ans, et Lara, 23 ans, ainsi que la petite fille de Minu Barati, 6 ans, assistaient à la cérémonie. «Quand on aime une femme, on doit prendre son cœur dans la main et le lui donner», avait dit un jour Fischer, qui pendant longtemps ne voulait pas d'un nouvel enfant avec ses compagnes et épouses successives «car je ne veux pas être un père physiquement et moralement absent». Pour la presse populaire allemande, ce mariage serait bel et bien le signe que le ministre, qui a refusé de prendre la direction du groupe parlementaire des Verts, est en train de renoncer définitivement à la politique.
Fischer connaît bien le Capitole de Rome pour y avoir signé avec ses collègues européens, juste au-dessus de la Sala Rossa, le Traité constitutionnel européen aujourd'hui si malmené. Mais il serait de mauvais goût d'y voir un signe prémonitoire.