Pour les anti-Morsi, il ne fait aucun doute. «Le président doit partir. Avec lui, le pays a suffisamment souffert. Aucune concession n’est acceptable», prévient Kamil Youssef, un des nombreux organisateurs de «Tamarod», cette organisation d’ex-révolutionnaires devenue, en l’espace de deux mois, le nouveau visage de l’opposition. Avec ses 22 millions de signatures réclamant la chute du chef d’Etat islamiste, et le soutien de dizaines d’autres partis, elle espère bien avoir son mot à dire dans l’architecture d’une éventuelle transition politique.

«Un avant-programme a déjà été élaboré», avance Ahmed Hawary, le porte-parole du Front du 30 juin. Cette nouvelle coalition réunie autour de Tamarod et des principaux partis d’opposition a déclaré, mardi, dans un communiqué que l’ex-chef de l’Agence internationale de l’énergie atomique, Mohamed ElBaradei, serait sa «voix» chargée de «préparer un scénario» en vue de mettre en œuvre une «transition politique». «Le pays a besoin d’une phase intermédiaire pour rectifier les dégâts et replacer les demandes de la révolution sur leur droit chemin», poursuit l’opposant laïc. «Ainsi, nous proposons que le pouvoir intérimaire soit accordé au président de la Haute Cour constitutionnelle. Un pouvoir symbolique, lui permettant d’assurer la transition avant de nouvelles élections à l’aide d’un mini-cabinet gouvernemental chargé de trois dossiers principaux: l’économie, la sécurité et la préparation des élections. En parallèle, un comité juridique composé de professeurs de droit, de doyens d’université et de juristes entamera une révision des lois imposées ces deux dernières années. Quant à la Constitution, elle sera soit réécrite, soit révisée», explique-t-il.

Propositions d’Al-Nour

L’opposition libérale n’est pas la seule à avoir songé à une «feuille de route». Habiles politiciens, les salafistes d’Al-Nour ont appelé, lundi soir, à des élections anticipées dans un communiqué publié à l’issue de l’ultimatum de l’armée. Cette faction islamiste qui se positionne aujourd’hui en rivale du président Morsi dit vouloir «éviter le carnage» et «empêcher une guerre civile». Sa proposition en trois points suggère également la «formation d’un gouvernement neutre de technocrates afin de résoudre les problèmes du quotidien et de superviser les prochaines élections législatives, qui devraient avoir lieu le plus vite possible». Enfin, elle suggère «la formation d’un comité chargé de réviser la Constitution», mais dans certaines limites.

Dans son ultimatum adressé lundi après-midi, l’armée a elle aussi évoqué «une feuille de route», «si les revendications du peuple n’étaient pas satisfaites durant cette période». Dans son communiqué aussi bref qu’ambigu, et qui ne cite jamais directement le président, aucun détail ne transparaît sur le programme qu’elle songe à mettre en œuvre. Mais, selon une source militaire citée par l’agence Reuters, l’armée envisagerait de suspendre la Constitution et de dissoudre le parlement à majorité islamiste. A la veille de la fin de l’ultimatum, la rue cairote bruisse de mille et une rumeurs.