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L’OTAN doit tourner la page de l’Afghanistan

La fin de la mission de l’OTAN dans le pays marque un tournant décisif

Tourner la page de l’Afghanistan

Enterrée, l’ambition de transformer l’Alliance atlantique en une sorte de gendarme occidental, au service d’ambitions démocratiques. Au pays de Galles, où l’OTAN va fêter son 65e anniversaire, l’annonce de la fin des opérations de combat menées par la FIAS (Force internationale d’assistance et de sécurité), sous le commandement de l’OTAN depuis 2003) concrétisera un retour brutal aux réalités pour un organe prié de se recentrer sur la défense territoriale face aux menaces russes. «A-t-on affaibli l’OTAN en étirant son rôle et ses missions? La question doit être posée», soulève une source française.

Un embryon de réponse sera apporté, lors du sommet, par le chef d’état-major de l’Alliance, le général de l’US Air Force Philip Breed­love. Son plan, que devra mettre en œuvre à partir de son entrée en fonction le 1er octobre le nouveau secrétaire général norvégien, Jens Stoltenberg, préconise une réorganisation du commandement, et une meilleure inter-opérabilité entre forces des pays membres en Europe. L’ironie, reconnaît-on à l’OTAN, est que l’Alliance a gagné en efficacité sur les théâtres extérieurs (intervention aérienne en Libye, maritime dans l’océan Indien, Kfor au Kosovo, Afghanistan), mais qu’elle n’a pas su digérer la fatigue post-opérationnelle. «En gros, concède un de ses ex-responsables, l’idée était qu’on revenait à Mons (QG de l’Alliance, en Belgique) pour se reposer de l’Afghanistan. Or la crise russo-ukrainienne a tout changé. Les «talibans» les plus dangereux ne sont plus les islamistes afghans, mais les forces spéciales russes en Ukraine…»

La périphérie de l’Alliance

Trois leçons en résultent. La première est que les vingt-huit pays de l’OTAN doivent faire converger leur posture militaire et diplomatique. Plus l’Union européenne accroît ses sanctions contre la Russie, plus les tensions sur le terrain augmentent, et une coordination s’impose. Le fait que la France ait, hier, à la veille du sommet, annoncé sa décision de suspendre la livraison à Moscou du premier navire Mistral est, de ce point de vue, révélateur.

Le second enseignement est le grand chambardement des relations de l’OTAN avec sa périphérie. A quoi bon conserver la Russie au sein du «partenariat pour la paix» aux côtés d’Etats neutres (Suisse, Finlande, Suède, Autriche), et d’Etats désireux d’intégrer l’Alliance (Géorgie, Ukraine)? «Il y a des bons voisins, et des voisins dangereux. L’OTAN doit trier. Et réinventer des catégories», jugeait récemment une note d’Egmont, l’institut stratégique belge.

Dernière leçon: les règles d’engagement. Que vaut encore l’accord passé en 1997 avec la Russie, qui a mis fin aux relations hostiles de la Guerre froide? Et doit-on redéfinir l’article 5 de la charte de l’Alliance qui impose une réaction collective en cas d’agression envers un membre, alors que le danger intervient aujourd’hui dans un pays non membre (l’Ukraine), mais avec des conséquences directes comme l’approvisionnement énergétique pour les pays Baltes? L’Afghanistan, au regard de ces défis, paraît bien loin.