La commission Mitrokhine affirme s'être, entre autres, fondée sur l'audition de nombreux experts dont celle du juge français antiterroriste Jean-Louis Bruguière. «Il nous a expliqué qu'il avait des certitudes objectives sur le fait que le GRU a reçu directement l'ordre de la part du Politburo et de Brejnev (ndlr: secrétaire général du PCUS) d'éliminer le pape», a expliqué Paolo Guzzanti. Le GRU aurait ensuite «procédé à une répartition des tâches» entre les services du bloc de l'Est: le KGB n'aurait fourni qu'une assistance «accessoire»; l'Allemagne de l'Est se serait chargée de la désinformation; et les services bulgares auraient eu pour fonction de couvrir l'opération. «Il est probable que Agça était destiné à mourir après avoir tué le saint-père mais que les développements convulsifs suite à l'échec de l'attentat ont bouleversé les plans», précisent les parlementaires.
Dès 1981, la «piste bulgare» avait été avancée par Ali Agça lui-même. Immédiatement arrêté, le terroriste d'extrême droite avait affirmé connaître trois citoyens bulgares présents à Rome au moment de l'attentat dont le chef d'escale de la compagnie Balkan Air, Sergueï Antonov. Deux procès successifs avaient néanmoins échoué à établir la culpabilité du représentant bulgare, Ali Agça s'étant, entre-temps, rétracté.
Un Bulgare aux moustaches noires sur place
Reprenant tous les clichés photographiques pris devant la basilique Saint-Pierre le 13 mai 1981, la commission Mitrokhine estime aujourd'hui détenir une preuve décisive. Après deux nouvelles expertises effectuées «avec des moyens modernes», les parlementaires soutiennent être «presque à 100%» certains que l'homme aux moustaches noires qui, parmi la foule, observe Jean Paul II blessé dans sa papamobile serait le chef d'escale. «Antonov était présent [...] Il a menti ainsi que les autorités bulgares», tranche le rapport.
Dès jeudi soir, le service russe de renseignement extérieur a qualifié de «complètement absurdes» les conclusions du rapport. Paolo Guzzanti a cependant souligné que «Vladimir Poutine a été le plus gros obstacle à la commission: il ne nous a pas ouvert les archives et même pas le placard à balais».