«Les citoyens pris en otage»
«Je suis outrée par cette injustice à tous les niveaux. On ne laisse pas se présenter des candidats qui ont rassemblé toutes les signatures nécessaires. Et on arrête des gens qui manifestent pacifiquement", a déclaré Irina Dargolts, une ingénieure de 60 ans. «J'ai l'impression que le pays est prisonnier et ses citoyens en otage. Personne ne représente les gens», a renchéri Dmitri Khobbotovski, un militant du mouvement "Russie ouverte" de l'ex-oligarque en exil Mikhaïl Khodorkovski.
La dernière figure de l'opposition en liberté, la jeune avocate Lioubov Sobol, a été interpellée avant la manifestation après une perquisition à son local de campagne. «Je ne vais pas aller à la manifestation. Mais vous savez quoi faire sans moi. Je suis fière de tous ceux qui sont venus», a-t-elle déclaré sur Twitter. Si l'opposition est décimée, plusieurs personnalités parfois éloignées de la politique ont manifesté, comme l'un des rappeurs les plus populaires de Russie, Oxxxymoron, arborant un t-shirt de soutien à Egor Joukov, un étudiant emprisonné.
Des artistes célèbres comme le groupe électro IC3PEAK, dont plusieurs concerts ont été interdits ces derniers mois, se sont produits sur scène. A 16 h, à l'approche de la fin autorisée de la manifestation, la police a demandé aux organisateurs de commencer à évacuer la scène. D'autres rassemblements ont eu lieu dans plusieurs villes. A Saint-Pétersbourg, 39 personnes ont été interpellées et six autres à Rostov-sur-le-Don, selon l'ONG OVD-Info qui a aussi compté six interpellations à Moscou.
De nombreux candidats évincés
La contestation a démarré après le rejet, pour des prétextes douteux, d'une soixantaine de candidats indépendants aux élections locales du 8 septembre, qui s'annoncent difficiles pour les candidats soutenant le pouvoir dans un contexte de grogne sociale. Les deux précédentes manifestations de l'opposition, le 27 juillet et le 3 août, n'avaient pas été autorisées et s'étaient soldées par respectivement 1.400 et un millier d'interpellations.
Le durcissement du régime s'exprime aussi par les nombreuses perquisitions et peines de prison imposées à des opposants, tandis que les inculpations pour «troubles massifs» visant de simples manifestants se sont multipliées. Les autorités tentent par tous les moyens de décourager les jeunes Moscovites de manifester. Le Parquet a ainsi demandé cette semaine le retrait de ses droits parentaux à un couple ayant manifesté avec son bébé, laissant peser une menace sur les parents tentés de faire de même.