Syrie
Vexée par les frappes de Trump, la Russie promet de renforcer la défense aérienne de la Syrie. L’escalade est sensible mais reste verbale

Une volée de tomahawks passant au-dessus de sa tête a conduit Vladimir Poutine à déterrer la hache de guerre… informationnelle. Donald Trump, le président américain que Vladimir Poutine avait tant espéré avoir pour homologue afin de partager avec lui le globe en «zones d’influences», a osé le défier vendredi dans son pré carré: le ciel syrien. La réaction ne s’est pas fait attendre. «C’est une agression contre un État souverain sous un faux prétexte», a tonné le Kremlin. Sarcastique, le premier ministre Dmitri Medvedev parle de «bonne nouvelle pour les terroristes».
Moscou ne s’attendait pas à une réaction aussi énergique et rapide de la part d’un président américain, qui affirmait récemment vouloir se limiter à combattre l’État Islamique en coopération avec la Russie, sans réclamer le départ de Bachar al-Assad.
Mémorandum suspendu
En fin de matinée, Moscou a suspendu le mémorandum sur la prévention des incidents militaires en Syrie établi avec Washington, un canal de communication direct entre les deux armées qui fonctionnait plutôt bien depuis une année. Vladimir Poutine a demandé une réunion d’urgence du conseil de sécurité de l’ONU. Sur le terrain syrien, le ministre russe de la Défense a promis de «renforcer les défenses antiaériennes de l’armée syrienne». En octobre dernier, il avait prévenu que ces équipements «abattraient les appareils de l’alliance occidentale si les États-Unis lançaient des attaques» contre le régime de Bachar al-Assad. Humiliée d’avoir vu ses défenses percées par des missiles américains, l’armée russe a dénigré une attaque «de très basse efficacité».
Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, qui doit recevoir son homologue américain Rex Tillerson la semaine prochaine à Moscou, a replacé les événements dans une perspective historique. «Cela rappelle la situation de 2003, lorsque les États-Unis ont envahi l’Irak sans l’accord du Conseil de sécurité de l’ONU sur la base de «preuves fabriquées». Désormais, ils ne se donnent plus la peine d’apporter des arguments factuels.»
Rhétorique de Guerre froide
Sur une veine complotiste, la porte-parole du ministère Maria Zakharova insinue que les frappes américaines ont été planifiées à l’avance «pour faire une démonstration de force». L’influent député Leonid Sloutsky avance qu’il est «très probable que l’attaque chimique dans la province d’Idlib soit une provocation occidentale». La parenthèse de réchauffement ouverte par l’élection de Donald Trump s’est vite refermée pour laisser de nouveau place à une rhétorique de Guerre froide.
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