Publicité

A Jérusalem, la réforme de la justice est conspuée

Des milliers de personnes manifestent à Jérusalem, devant le parlement israélien, contre un projet de loi de réforme du système judiciaire. Celui-ci est susceptible d’augmenter l’emprise du pouvoir politique sur la justice

Une vue aérienne montre des manifestants rassemblés devant le parlement israélien à Jérusalem, le 13 février 2023. — © ILAN ROSENBERG / REUTERS
Une vue aérienne montre des manifestants rassemblés devant le parlement israélien à Jérusalem, le 13 février 2023. — © ILAN ROSENBERG / REUTERS

Dans une mer de drapeaux israéliens, les manifestants réunis à Jérusalem, devant le parlement israélien, brandissent des pancartes comme «Sauvons la démocratie israélienne», «Pays en faillite morale» ou «Nous sommes devenus fous.» Ils s’opposent à un projet de loi de réforme du système judiciaire qui pourrait augmenter l’emprise du pouvoir politique sur la justice. En l’absence de chiffres communiqués par la police, les médias locaux estiment la foule à plusieurs dizaines de milliers de personnes, ce qui représente une forte mobilisation à l’échelle d’Israël.

Les contestataires crient depuis ce matin leur mécontentement alors que la commission des lois a commencé à voter certaines dispositions de ce texte présenté par le gouvernement du premier ministre Benjamin Netanyahu, ouvrant la voie à un vote en première lecture. Pendant le débat, des altercations ont eu lieu entre des députés issus du parti centriste Yesh Atid, opposés à la réforme, et le président de la commission parlementaire Simcha Rothman du parti d’extrême droite Sionisme religieux, qui défend cette réforme. «Honte, Honte», ont scandé les députés de l’opposition. Une vidéo de la chaîne parlementaire a montré trois députés, dont deux qui s’étaient assis par terre, alpagués par des gardes et conduits vers la sortie.

Mise en péril de la démocratie

Les organisateurs du mouvement de contestation considèrent que la réforme met en péril le caractère démocratique de l’Etat d’Israël. Ils appellent à une grève nationale ce lundi 13 février. Benjamin Netanyahu est revenu au pouvoir fin décembre en prenant la tête d’un des gouvernements les plus à droite de l’histoire d’Israël, issu d’une alliance entre son parti, le Likoud (droite), des partis d’extrême droite et des formations ultraorthodoxes juives.

Lire aussi: Le gouvernement israélien va légaliser neuf colonies en Cisjordanie

Début janvier, le ministre de la Justice Yariv Levin a annoncé un projet de réforme de la justice contre lequel manifestent chaque samedi soir des dizaines de milliers de personnes, principalement à Tel-Aviv, mais aussi à Jérusalem ou Haïfa. Le projet vise à accroître le pouvoir des élus sur celui des magistrats et limiterait considérablement la capacité de la Cour suprême à invalider des lois et des décisions du gouvernement.

Une vue aérienne montre des manifestants rassemblés devant le parlement israélien à Jérusalem, le 13 février 2023. — © ILAN ROSENBERG / REUTERS
Une vue aérienne montre des manifestants rassemblés devant le parlement israélien à Jérusalem, le 13 février 2023. — © ILAN ROSENBERG / REUTERS

Une clause «dérogatoire» permettrait ainsi au parlement d’annuler à la majorité simple une décision de la Cour suprême, que Benjamin Netanyahu et ses alliés jugent politisée. Benjamin Netanyahu est lui-même jugé pour corruption dans plusieurs affaires. Si cette réforme était adoptée, elle pourrait être utilisée pour casser une éventuelle condamnation, avancent ses détracteurs.

Des pourparlers

Dimanche soir, le président israélien, Isaac Herzog, s’est adressé à la nation dans un discours télévisé et a appelé au dialogue pour mettre fin à la «polarisation» qui divise selon lui le pays. «Il est possible de parvenir à un consensus», a-t-il déclaré, proposant de suspendre le processus législatif en cours afin de mener des discussions entre les différentes parties.

Après cette allocution, le ministre de la Justice Yariv Levin a déclaré qu’il n’avait pas l’intention de retarder la législation. Tout en se disant prêt à mener des pourparlers avec l’opposition, il a affirmé que les discussions ne devaient pas être utilisées «pour retarder ou empêcher cette réforme fondamentale du système judiciaire.»

Le combat contre la réforme «ne cessera pas», a affirmé sur Twitter le chef de l’opposition Yaïr Lapid. Les chefs des partis de l’opposition ont annoncé la tenue d’une conférence de presse cet après-midi. «Il y a urgence. Nous ne laisserons pas détruire l’Etat d’Israël», ont-ils affirmé dans un communiqué commun.