Famine
La communauté internationale n'a pas répondu aux attentes de l'ONU face à la menace d'une famine au Yémen. Environ 1,6 milliard de dollars ont été promis lors d'une conférence de donateurs coprésidée lundi par la Suisse. Berne va attribuer 14 millions de francs

«Il sera impossible avec ce montant d'empêcher une vaste famine», a affirmé à la presse le chef des affaires humanitaires de l'ONU Mark Lowcock qui demande aux Etats davantage d'efforts. L'enveloppe est inférieure au total reçu l'année dernière, lui-même à la moitié de ce que l'ONU avait alors demandé. Des organisations ont déjà dû diminuer ou fermer certains dispositifs face à la pire crise humanitaire au monde.
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Pour cette année, l'ONU avait estimé les besoins à près de 3,9 milliards de dollars (environ 3,56 milliards de francs). Le résultat est «décevant», a dit le secrétaire général Antonio Guterres, mentionnant seulement "un premier paiement" face aux défis.
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«Il n'y a pas de raison de célébrer», a renchéri de son côté le chef du Corps suisse d'aide humanitaire, l'ambassadeur Manuel Bessler.
L'ONU avait pourtant multiplié les mises en garde lors de cette conférence qu'elle coprésidait pour la quatrième fois avec la Suisse et la Suède. «La situation humanitaire n'a jamais été pire au Yémen», avait affirmé au début de la réunion M. Guterres.
Blinken offensif
«Nous pouvons choisir la voie de la paix ou laisser les Yéménites sombrer dans la pire famine qu'ait connue le monde depuis des décennies», a expliqué de son côté M. Lowcock, qui va prochainement quitter son mandat. Plus de 20 millions de personnes au total ont besoin d'assistance, dont 16 millions sont en difficulté alimentaire. Et 5 millions de personnes pourraient être exposées directement à la famine qui affecte déjà plusieurs dizaines de milliers de personnes. Plus de 4 millions de personnes sont déplacées.
Aux difficultés de plusieurs années de conflit s'est ajoutée la pandémie. «Les personnes qui souffrent déjà le plus sont particulièrement atteintes», a dit de son côté le conseiller fédéral Ignazio Cassis. «Comme les Yéménites», a-t-il ajouté.
Parmi les efforts annoncés lundi, l'Arabie saoudite, alliée du gouvernement yéménite dans le conflit contre les rebelles Houthis, va donner 430 millions de dollars pour cette année. Et les Emirats arabes unis plus de la moitié. Soutien des Houthis, l'Iran a de son côté reproché à la coalition internationale d'avoir empêché l'acheminement de l'assistance humanitaire.
Affirmant la volonté du président Joe Biden d'être actif sur le Yémen, le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a appelé les rebelles à mettre un terme à leur offensive sur Marib qui a déplacé de nombreuses personnes. Il a demandé aux parties «de ne pas interférer» dans la distribution d'aide humanitaire depuis le sud du pays.
Appel lancé par Guterres
Les Etats-Unis ont promis l'équivalent de près de 180 millions de francs d'aide supplémentaire, plus que doublant leur assistance cette année.
Côté suisse, Berne a donné plus de 70 millions de francs ces dernières années pour l'assistance humanitaire au Yémen. La Suisse soutient les activités d'organisations comme le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et le Programme alimentaire mondial (PAM). Celles-ci portent sur l'eau et l'assainissement, la sécurité alimentaire ou encore la protection des civils.
L'année dernière, le conflit a tué ou blessé plusieurs milliers de civils. Les violences ont provoqué une détérioration des infrastructures et moins d'un centre de santé sur deux est entièrement actif.
Le conseiller fédéral demande un accès humanitaire «sans entraves» et tient à ce que le droit international humanitaire (DIH) soit honoré. Aussi bien M. Cassis que M. Guterres et M. Blinken ont appelé à mettre un terme à cette guerre de plusieurs années qui a fait des dizaines de milliers de victimes.
Ils ont demandé un cessez-le-feu «immédiat» sur tout le territoire yéménite. Et d'avancer également dans les discussions politiques.