Cela ressemble à un bras d’honneur, cela pourrait être un appel du pied. La Corée du Nord a repris vendredi son chantage nucléaire en se vantant d’être parvenue au dernier stade de l’enrichissement de l’uranium, dans une lettre adressée aux Nations unies. La dictature stalinienne ajoute qu’elle est également en train de transformer ses réserves de plutonium en arme atomique. Une nouvelle provocation qui survient au moment même où l’envoyé spécial de Barack Obama, Stephen Bosworth, arrive à Séoul pour coordonner les efforts diplomatiques visant à isoler le régime de Pyongyang.

Après plusieurs semaines d’apaisement marquées par la visite de Bill Clinton à Pyongyang début août, le «cher leader» Kim Jong-il a décidé de remettre la pression sur la communauté internationale avec l’espoir d’ouvrir des négociations directes avec les Etats-Unis. «Nous avons procédé avec succès à l’expérimentation de l’enrichissement d’uranium et elle est entrée dans la phase finale», a déclaré l’agence officielle nord-coréenne.

C’est la réponse de la dictature aux questions de l’ONU concernant une cargaison d’armes nord-coréennes en route pour l’Iran, saisie le mois dernier aux Emirats arabes unis. Par ce geste, Pyongyang veut afficher son dédain pour les nouvelles sanctions votées par le Conseil de sécurité en juin. Et montrer qu’elle est en passe de maîtriser une technologie alternative à la militarisation du plutonium en vue de développer des bombes atomiques. Une affirmation qui ne convainc pas les experts, qui doutent de la capacité du royaume ermite à maîtriser le cycle complexe de l’enrichissement.

Tromper l’ennemi

La Corée du Sud a immédiatement dénoncé la provocation de Pyongyang et rappelé que seule une renonciation à l’arme nucléaire permettrait de relancer les négociations dans l’impasse. Séoul estime que les récentes ouvertures de Kim Jong-il, comme la levée des restrictions à la frontière ou la reprise des réunions familiales intercoréennes, ne sont qu’une offensive de charme pour tromper l’ennemi. Tout cela est «tactique», résume le ministre de l’Unification, Hyun In-taek, partisan d’une ligne dure contre le Nord.

Washington a réagi avec plus de prudence, refusant de tomber dans le piège de l’escalade. «Tout ce que la Corée du Nord peut faire dans le domaine du développement nucléaire est préoccupant pour nous», a seulement déclaré Stephen Bosworth, qui venait de s’entretenir avec ses homologues chinois à Pékin. Car les diplomates américains, comme beaucoup d’experts, estiment que la dictature est proche de revenir à la table des pourparlers à six qu’elle avait quittés au printemps. «Il faut lire entre les lignes. Leur position s’est assouplie», estime Cheong Seong-chang, spécialiste au Sejong Institute. «Nous sommes prêts aux sanctions comme au dialogue», affirme Pyongyang.

L’administration Obama envisage des discussions bilatérales mais seulement dans le cadre des négociations à six. «Chacun va devoir faire un pas», estime Cheong Seong-chang qui prédit une rencontre par l’intermédiaire de la Chine, «d’ici à quelques jours ou quelques semaines».