Samedi, la véritable star de la Conférence internationale sur la sécurité, qui vient de se tenir pendant deux jours à Munich, était Vitali Klitschko. Ni ministre, ni stratège, l’ancien champion de boxe, qui parle mal l’ukrainien pour avoir surtout vécu en Allemagne, est pourtant devenu, à l’étranger du moins, le représentant de l’opposition ukrainienne. A Munich, il a multiplié les contacts, rencontrant tour à tour les ministres américain, français et allemand des Affaires étrangères, avec toujours le même message: «Je suis bien placé pour le savoir, on ne gagne pas sans se battre.» A la tribune de la conférence, Vitali Klitsch­ko, très applaudi, a réclamé des «sanctions internationales» à l’encontre «de ceux qui ont violé les droits de l’homme». Dans la salle, il était assis au côté du ministre ukrainien des Affaires étrangères, Leonid Kojara, les deux hommes enfoncés chacun dans son siège, le plus loin possible l’un de l’autre.

A Munich, le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, a également rencontré les autres dirigeants de l’opposition, Arseni Iatseniouk ou encore la chanteuse Rouslana, afin de mieux estimer dans quelle mesure les différents courants de la contestation seraient en mesure de constituer un éventuel gouvernement de transition.

La vaste offensive de charme de l’opposition ukrainienne semble avoir porté quelques fruits. Samedi, John Kerry a expliqué que «les Etats-Unis et l’Union européenne se tiennent aux côtés du peuple ukrainien dans son combat pour le droit à l’autodétermination». Dans une claire allusion à la Russie, le secrétaire d’Etat a affirmé que les Ukrainiens «considèrent que leur avenir ne dépend pas d’un seul pays, et certainement pas sous la contrainte». Jamais Washington ne s’était si clairement exprimé en faveur de l’opposition depuis le début de la crise ukrainienne, fin novembre. Samedi dans la soirée, le chef de la diplomatie allemande, Frank Walter Steinmeier, annonçait que l’Ukraine venait d’accepter que l’opposant Dmytro Boulatov puisse se rendre en Allemagne, s’il le souhaite, pour y être soigné. L’homme, le visage couvert de sang et assigné à résidence, affirme avoir été enlevé et torturé. Il a finalement quitté l’Ukraine hier pour se rendre à Riga, en Lettonie, pour recevoir des soins.

A Kiev, les petits succès diplomatiques obtenus par l’opposition à Munich – largement relayés par les médias ukrainiens – semblent avoir redonné courage aux manifestants. Dimanche, des dizaines de milliers de personnes prenaient de nouveau d’assaut la place de l’Indépendance (Maïdan), pour réclamer la libération des manifestants arrêtés, le départ du président Viktor Ianoukovitch et un retour à la Constitution de 2004, autrement dit la réduction du pouvoir présidentiel. Viktor Ianoukovitch, de son côté, annonçait vouloir reprendre le travail ce lundi, après une infection pulmonaire et alors que l’opposition envisage clairement la menace d’une intervention de l’armée, qui dit «craindre pour l’intégrité territoriale».

Sur la défensive, la Russie a été à plusieurs reprises mise en cause sur le dossier ukrainien, mais aussi sur la Syrie – où les participants n’ont pu que constater leur impuissance –, et le nucléaire iranien.

Hier, c’est vers le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, que se tournaient tous les regards. La simple présence du diplomate, qui s’est entretenu en tête-à-tête avec John Kerry, était déjà en soi une sensation. Les discussions ont porté sur le nucléaire iranien et la reconnaissance d’Israël. Téhéran s’était engagé, le 20 janvier, à geler certaines activités nucléaires sensibles, et les négociateurs doivent se retrouver le 18 février à Vienne. L’Iran a demandé la levée de certaines sanctions sur les exportations pétrochimiques, le commerce de l’or ou l’aéronautique. Mais le secrétaire d’Etat américain a affirmé «clairement que les Etats-Unis allaient continuer à appliquer les sanctions actuelles», selon une porte-parole américaine. A Téhéran pourtant, les délégations économiques allemande, italienne, française, autrichienne ou portugaise se relaient, spéculant sur la levée prochaine de l’embargo, et dans l’espoir de décrocher les contrats qui leur permettront de participer au développement du pays.

Le chef de la diplomatie iranienne, Mohammad Javad Zarif, a eu un entretien en tête-à-tête avec John Kerry