Le parcours d’obstacles de Barack Obama
états-unis
A l’issue des élections du «midterm», le chef de la Maison-Blanche réussira-t-il à gouverner avec une majorité républicaine au Congrès? Bill Clinton, terrassé par la «révolution républicaine» en 1994, avait quand même réussi à se faire réélire deux ans plus tard
Analyse
«Vous savez, c’est quelqu’un de très stable et posé. Il comprend les hauts et les bas de cette affaire. Je ne crois pas qu’il soit ravagé par la pensée de ce que cela signifie pour lui. Il est concentré sur la défense de sa politique.» Jusqu’au dernier jour, David Axelrod, le conseiller politique de Barack Obama, s’est employé à expliquer le calme apparent de son chef. C’est entendu: les élections de mardi ont eu valeur de «référendum» pour un président qui, désormais, sera en partie menotté par l’opposition républicaine au Congrès. Mais si l’ouverture de ce nouveau chapitre rend Obama anxieux, il ne l’a pas montré.
Ceux qui s’en souviennent constateront le contraste avec la nervosité affichée par Bill Clinton dans les mêmes circonstances. Novembre 1994: celui qui est alors le jeune prodige démocrate est terrassé à mi-mandat par une «révolution républicaine» qui prend le contrôle de la Chambre des représentants et du Sénat. Clinton est amer en voyant s’écrouler autour de lui sa majorité démocrate. Mais il tend la main à ses rivaux républicains, à qui il demande de le «rejoindre au centre du débat public, d’où doivent venir les meilleures idées».
Barack Obama, lui aussi, fera-t-il un pas vers le centre? Du point de vue idéologique, le président actuel est sans doute plus à gauche que Bil Clinton, ce new democrat qui s’était posé d’entrée comme le représentant de la gauche modérée. Dans le même temps, l’irruption des candidats du Tea Party devrait galvaniser une droite qui a rarement défendu des positions aussi extrêmes sur le rôle dévolu à l’Etat ou en matière budgétaire.
Sur la défensive
Le chemin risque donc d’être long de part et d’autre jusqu’à se rejoindre dans ce centre politique dont parlait Bill Clinton. Et ce, d’autant plus que l’administration Obama s’est déjà épuisée une année entière à tenter de trouver un «terrain d’entente» avec les républicains (on ne parle plus de «centre» dans le panorama politique américain), avant d’abandonner de guerre lasse et de faire le forcing sur les grands chantiers chers aux démocrates, comme la réforme de la santé ou la régulation financière.
Si la collaboration n’a pas été le fort de ce Congrès au cours des deux années précédentes, la situation n’en est pas moins inversée: à partir de janvier prochain, c’est la Maison-Blanche qui sera sur la défensive. Oubliées, sans doute, les grandes velléités démocrates à propos des dossiers de l’immigration ou de l’environnement: l’une de ses principales occupations consistera à voir venir les attaques. Elles devraient fuser pour démanteler les réformes à peine mises en route. Par le biais de verrouillages financiers, en provocant des délais et en érigeant tout une série d’obstacles, les républicains tenteront de miner les fondations, à défaut de pouvoir s’attaquer de front à l’ensemble de l’édifice.
Premières cibles: la santé, d’abord, qui reste une construction fragile tant que les Américains ne commenceront pas à bénéficier pleinement des effets de la réforme. L’agence chargée de défendre les intérêts des consommateurs ensuite, cet organisme créé par la loi sur la régulation du système financier qui hérisse particulièrement les lobbies financiers proches des républicains.
Dans le même exercice, Bill Clinton s’était surpassé, reculant lorsqu’il le fallait, arrachant aux républicains ce qu’il pouvait, lançant au passage une bataille féroce qui avait débouché quelque temps sur la paralysie du gouvernement faute d’accord sur le budget. La stratégie avait si bien réussi au démocrate que, contre toute attente, il avait été triomphalement réélu, s’arrogeant lui-même le surnom de come-back kid.
Barack Obama, lui, devra commencer par renouveler l’équipe de ses conseillers les plus proches, qui ont commencé à quitter le navire à l’approche de ces élections. Et surtout, il aura affaire à des républicains qui, aujourd’hui, connaissent la chanson. «Notre priorité politique consiste à être sûrs qu’Obama ne fera qu’un seul mandat», confiait il y a quelques jours le chef des républicains au Sénat, Mitch McConnell. En somme, il sera moins question de défendre des politiques que de provoquer la faute chez l’adversaire.