Le Parlement européen, nouvel acteur du jeu bilatéral
suisse-europe express
Fort des pouvoirs étendus accordés par le Traité de Lisbonne, le Parlement européen, version 2009-2014, pourrait bien devenir un acteur-clef des relations Suisse-UE.
« Ne dites pas à Berne que le Parlement européen existe, ils ne le savent pas.... » Cette boutade, entendue récemment de la bouche d’un Conseiller national de passage à Bruxelles, reflète bien la pensée helvétique dominante sur l’Assemblée réélue le 7 juin dernier.
A quoi bon, pour faire bref, accorder trop d’importance à ces eurodéputés dont les pouvoirs, dans les domaines cruciaux comme la fiscalité - régis par l’unanimité des Vingt-Sept - demeurent nuls ou presque ? Le bon, le vrai lobbying suisse ne doit-il pas plutôt se concentrer sur ce centre «nerveux » de la machine communautaire qu’est la Commission européenne ? Une Commission qui, il est vrai, partage avec l’administration fédérale le goût de la chose technique et juridique, loin du tumulte politique du Conseil (représentant les Etats-membres) et de ce Parlement européen encore considéré comme un OVNI institutionnel.
Attention, toutefois, à ne pas se tromper d’époque. Le Traité de Lisbonne, en augmentant les pouvoirs de co-décision dévolus au Parlement européen, fait de ce dernier un acteur de plus en plus incontournable. S’y ajoute, en période de crise, de surchauffe économico-sociale et de retour de l’Etat dans l’économie du continent, une fonction d’interpellation appelée à se développer. Une Commission temporaire sur la crise, chargée d’examiner les politiques de relance et les évolutions de la réglementation financière, a été crée. Ses membres, à commencer par sa présidente, la socialiste française Pervenche Bérès, participeront aux auditions prochaines des candidats-commissaires européens, prévues pour le début décembre, entre Strasbourg et Bruxelles. Les parlementaires, loin d’être atones, fourbissent leurs armes. Ils ont, qui plus est en début de mandat, l’intention d’exister.
Et alors ? Alors prudence. Pas plus tard que ces derniers jours, le bruit courrait ainsi à Bruxelles que la dite Commission, chargée d’examiner les causes de la crise financière et de s’assurer que les leçons sont retenues, pourrait fort bien auditionner certains ministres, universitaires ou financiers de pays-tiers. Il n’y aurait rien de choquant, par exemple, à ce que l’europarlement invite les responsables d’UBS à s’exprimer devant eux. « Au moins, cela nous donnera l’occasion de les engueuler. Ils le méritent» nous confiait récemment un élu. Ambiance...
S’y ajoute le moment clef des prochaines auditions. Celle du futur commissaire européen sur la fiscalité, par exemple, ne manquera pas de piquant. Le portefeuille actuellement occupé par le Hongrois Lazlo Kovacs - que son gouvernement a décidé de ne pas reconduire, lui préférant la semaine dernière Laszlo Andor, un haut fonctionnaire de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement - sera crucial pour les intérêts helvétiques. D’autant plus qu’en la matière, les trois grands voisins de la Suisse font de plus en plus confiance à la manière forte pour obtenir des résultats. Or qui dit grands pays, dit....nombre importants d’élus susceptibles de poser des questions, ou d’arracher au futur commissaire des promesses de fermeté. Juste quelques cailloux parlementaires posés sur la voie bilatérale...