Les réfugiés privés de piscine ou de discothèque
Allemagne
En Allemagne, plusieurs municipalités – dont la Verte Fribourg-en-Brisgau – cherchent à fermer l’accès de piscines ou discothèques aux réfugiés. Malaise chez les Grünen

Depuis les événements de Cologne – près de 1000 femmes et jeunes filles agressées par des réfugiés, pour la plupart Marocains ou Algériens pendant la nuit de la St Sylvestre –, le débat se durcit en Allemagne. Plusieurs municipalités envisagent ou en arrivent à des mesures radicales.
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A Bornheim, près de Cologne, les autorités communales ont décidé la fermeture temporaire de la piscine aux réfugiés masculins de plus de 18 ans, après que plusieurs femmes se sont plaintes de harcèlement. L’interdiction – suivie d’un intense débat – a entre-temps été levée. «Nous avons voulu montrer que les droits des femmes sont intangibles», explique le porte-parole de la municipalité.
Les multiplications des restrictions
Mais l’exemple fait tache d’huile. A Hermeskeil, en Rhénanie-Palatinat, seuls «les réfugiés qui ont compris le règlement» sont désormais admis dans la piscine locale. A Burg, en Saxe-Anhalt, le maire social-démocrate a demandé aux maîtres nageurs d’appeler la police pour le moindre écart aux règles de bonne conduite envers les nageuses. En Bavière, plusieurs établissements affichent désormais leur règlement interne en allemand et en arabe, rappelant notamment l’interdiction de harceler visiteuses ou maîtres nageuses: «Les femmes doivent être respectées, quel que soit leur vêtement de bain», précise désormais en plusieurs langues et à l’aide de dessins pour les analphabètes le règlement interne de toutes les piscines de Munich.
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Fribourg-en-Brisgau, ville étudiante du Bade-Wurtemberg réputée pour sa tolérance, fief des Verts depuis des décennies n’est pas épargnée. Depuis des semaines, les réfugiés se plaignent de ne plus êtres admis dans les discothèques de la zone piétonne, point de rencontre de la jeunesse de la ville. Un courrier a finalement mis le feu aux poudres. Les responsables du «White Rabbit», un établissement autogéré, envisagent d’y fermer la porte aux réfugiés. Ce mail interne – parvenu de façon obscure aux mains du parti populiste Alternative für Deutchland (AfD) en pleine campagne électorale en vue des régionales – évoque une recrudescence des vols et des cas de harcèlement «jusque dans les toilettes des femmes».
Alors que la polémique fait rage dans le pays, le maire de la ville, le Vert Dieter Salomon assure partager les inquiétudes des patrons des discothèques de sa municipalité. Il réclame «une ligne dure de la part de la police» et recommande la distribution de prospectus multilingues pour expliquer aux nouveaux venus le B-A-Ba d’un comportement civil. «Nous n’y arrivons pas», répète pour sa part Boris Palmer, le maire Vert de la ville voisine de Tübingen, plagiant le «nous y arriverons» d’Angela Merkel.
Le parti Vert paralysé par la situation
La question des réfugiés devient un véritable problème pour l’opposition allemande et tout particulièrement pour le parti Vert. A quelques semaines des régionales de la mi-mars, la priorité de la direction des Grünen est la réélection de Winfried Kretschmann, le seul ministre président vert d’un land allemand, le Bade-Wurtemberg. Du coup, ce parti engagé aux côtés des féministes mais aussi des réfugiés depuis la première heure, semble paralysé. Juste après les agressions, la direction des Verts avait un temps évité de mentionner la nationalité des agresseurs et certains parmi le mouvement des Jeunes Verts appelaient à la démission de Boris Palmer. Maintenant, ce sont les femmes du parti qui relèvent la tête, réclamant un débat ouvert sur l’immigration. «Nous les Verts nous devons nous attaquer sans tabous aux traditions et aux comportements sexistes, aux structures patriarcales et violentes», résume une militante, qui admet «ne plus pouvoir condamner comme elle l’aurait fait avant Cologne» la fermeture d’une piscine ou d’une discothèque aux réfugiés.
Comme cette militante, la direction est prise au dépourvu: avant les événements de Cologne, les Grünen pouvaient attaquer Julia Klöckner, tête de liste de l’Union chrétienne démocrate (CDU) en vue des élections de Rhénanie-Palatinat, pour avoir réclamé une loi «obligeant les réfugiés à traiter femmes et jeunes filles avec respect». Ni les Verts ni le parti de la gauche radicale Die Linke ne tentent plus vraiment de contrer la CDU sur ce terrain, alors que l’AfD est crédité de 13% d’intentions de vote aux régionales du 13 mars. Un tel score compromettrait la reconduction de la coalition SPD-Verts de Winfried Kretschmann à Stuttgart, et de la participation des Grünen au gouvernement régional de Rhénanie-Palatinat.