Sépulture anonyme
A l'issue des prières, la dépouille a été transportée en ambulance au cimetière, où les hommes de la famille royale saoudienne uniquement étaient présents. Le corps a été enseveli directement en terre dans son linceul puis recouvert de terre, selon la tradition musulmane. En vertu des préceptes du wahhabisme, la doctrine islamique puritaine, la tombe – même royale – est toute simple: seule une petite pierre en signale l'emplacement, sans inscription, rendant la sépulture anonyme, dans le cimetière public. Seul le carré réservé à la famille des Saoud distingue les tombes royales des autres. Le roi Fahd y repose, au milieu de quatre de ses prédécesseurs et de plusieurs membres de sa famille. Au moment de l'inhumation, les forces de sécurité quadrillaient le cimetière. Entre les stèles funéraires étalées sur un terrain désertique parsemé de buissons, les keffiehs à damiers rouges et blancs, abrités sous des ombrelles multicolores, se sont inclinés sur la dépouille.
Les dignitaires arabes musulmans ont présenté leurs condoléances à la mosquée, tandis que les dirigeants étrangers étaient conviés au Palais royal, à Riyad, pour le même hommage. Ils y étaient reçus par le nouveau roi Abdallah. Le roi Fahd a ainsi reçu les honneurs de dirigeants du monde entier. Le président français Jacques Chirac, le prince Charles, le roi d'Espagne Juan Carlos et une délégation américaine entre autres, étaient à Riyad. Samuel Schmid, le président de la Confédération, représentera la Suisse ce mercredi à la cérémonie de condoléances organisée à la mémoire du souverain saoudien. Les dirigeants arabes et musulmans étaient quant à eux presque tous présents.
Mais, au milieu d'hommages unanimes rendus en masse, les critiques du régime saoudien ont pris un relief particulier. Riyad est depuis longtemps dans le collimateur de bon nombre d'organisations de défense des droits de l'homme et de gouvernements occidentaux. Les abus pratiqués en terre de l'islam intégriste ont maintes fois été dénoncés. Tortures, arrestations arbitraires, répression et atteintes à la liberté d'expression seraient pour beaucoup à inscrire au passif du bilan saoudien. Même l'allié américain n'a pas été avare de critiques: dans son dernier rapport annuel sur la situation des droits de l'homme dans le monde, le Département d'Etat relevait les progrès accomplis vers la démocratie. Mais «le bilan sur les violations des droits de l'homme […] dépasse encore largement ces progrès», notait le document. En mai 2005, une commission mandatée par le Congrès américain a demandé à l'administration américaine d'imposer des sanctions à Riyad en soulignant que le royaume soutenait financièrement des activités «qui encourageaient l'intolérance religieuse, la haine et dans certains cas la violence».