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San Francisco durcit encore ses lois sur les armes à feu

Après la tuerie en Oregon et le meurtre d’une fillette dans le Tennessee, le lobby des armes vient de perdre une bataille symbolique. Le 31 octobre prochain, la ville californienne perdra son dernier armurier

La High Bridge Arms fermera ses portes dans quelques jours. San Francisco va perdre sa dernière armurerie — © Jeff Chiu
La High Bridge Arms fermera ses portes dans quelques jours. San Francisco va perdre sa dernière armurerie — © Jeff Chiu

Le 31 octobre prochain, San Francisco devrait perdre sa dernière armurerie, la High Bridge Arms. Celle-ci vend quelque 1000 armes à feu par an. Mais son propriétaire, Steven Alcairo, n’en peut plus de la volonté du «superviseur» de la ville californienne d’imposer l’installation d’une caméra de surveillance au magasin d’armes, relève The Guardian. Une violation inadmissible, selon lui, de la sphère privée.

Une île en Amérique

San Francisco apparaît comme une île en Amérique. Le second amendement de la Constitution qui reconnaît le droit de porter une arme est abondamment cité pour justifier la possession d’un pistolet ou d’un fusil chez soi pour se protéger de voyous, mais aussi, estiment les plus extrêmes, d’un gouvernement qui pourrait devenir «tyrannique».

Les armes à feu abondent dans des Etats comme la Floride, l’Arizona ou le Nevada. Des lois de légitime défense très subjectives appelées «Stand your Ground» (résiste) promeuvent le contraire de ce que l’autorité publique devrait promouvoir: le recours à une arme à feu pour se défendre si on se sent menacé dans son intégrité corporelle ou de mort. De telles lois ont déjà donné lieu à des abus dont les conséquences sont dramatiques.

Un thème explosif

Aux Etats-Unis, les armes à feu demeurent un thème explosif, pour ainsi dire. Le pays est le théâtre presque chaque semaine d’une fusillade. Récemment, un lycée technique de Roseburg, en Oregon, a vu un élève de l’établissement débarquer avec plusieurs pistolets et fusils d’assaut et faire feu sur plusieurs de ses camarades ainsi que sur l’enseignante. Neuf morts et une dizaine de blessés.

Si les candidats démocrates à la Maison-Blanche plaident pour un durcissement du contrôle des armes – même si Bernie Sanders a une position moins radicale sur le sujet –, les candidats républicains sont la plupart opposés à de telles mesures. Donald Trump estime que si le personnel du lycée Umpqua de Roseburg avait été armé, il y aurait eu moins de morts. Ben Carson est lui aussi convaincu du bienfait de la possession d’armes à feu. Il a même lâché que si les Juifs avaient été armés à l’époque nazie, ils auraient pu mieux se défendre et peut-être éviter l’Holocauste…

Régulation stricte

A San Francisco, la régulation en la matière est stricte. Il faut un permis pour le port d’arme, attendre dix jours avant de pouvoir en toucher une qu’on vient d’acheter. Tout acheteur doit se soumettre à un processus de vérification d’identité (background checks). Les marchands d’armes doivent tenir un inventaire précis des ventes et des stocks de munitions.

Le Law Center to Prevent Gun Violence, le Centre légal pour la prévention de la violence par les armes à feu, à San Francisco, place la Californie en tête des Etats américains appliquant des lois strictes en la matière avec une note A. L’Arizona et le Nevada apparaissent comme des cancres avec une note F.

Un modèle applicable au reste des Etats-Unis?

Le modèle de San Francisco peut-il être appliqué ailleurs dans le pays? Cela apparaît comme du wishful thinking. Après la tragédie de Newton, dans l’école primaire de Sandy Hook où 26 personnes furent abattues dont 20 enfants de six ans, beaucoup estimaient que cette horrible fusillade, en décembre 2012, allait être un tournant.

Peu après, le président Barack Obama avait mené une campagne musclée pour inciter le Congrès à agir et avait proposé plusieurs mesures. Il buta sur un Congrès hostile à tout durcissement de la législation sur les armes à feu et toujours sous l’influence de la National Rifle Association, le puissant lobby des armes.

Lire aussi:  le blog de notre correspondant Stéphane Bussard