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Sinistrose et coups bas dominent la rentrée des socialistes français

Un parti désuni et sans projet clair à la réunion de La Rochelle.

Les oreilles de François Hollande et de la direction du Parti socialiste français ont dû siffler tout le week-end. La réunion estivale du PS, à La Rochelle, a en effet tourné à l'exercice de critique, voire d'autodénigrement, de la part de cadres et de militants que leurs dissensions, leur incapacité à contrer efficacement Nicolas Sarkozy inquiètent de plus en plus.

François Hollande, qui cédera son poste de premier secrétaire dans deux mois, est le coupable idéal aux yeux de ceux qui veulent lui succéder. On lui reproche d'avoir fait du parti une «fédération d'écuries» sans cohérence, d'avoir proposé aux électeurs un informe «gloubiboulga» d'idées, de privilégier l'opposition de rejet plutôt que de projet. «J'aime beaucoup François, mais il a fait trop de compromis», résume un baron socialiste venu du Sud-Ouest.

L'intéressé a répondu avec ironie, dimanche, pour l'un de ses derniers discours de chef du parti: «J'ai été sensible aux paroles qui ont été prononcées, a-t-il dit, même si je me méfie des hommages.» François Hollande a tout de même reconnu qu'au terme de ses dix ans de mandat, le PS est menacé d'«émiettement» et de «déclassement».

Au printemps dernier, pourtant, le parti semblait sur la voie de la convalescence, avec une belle victoire aux élections municipales. Aujourd'hui, il est retombé au creux de la vague. Nicolas Sarkozy se paie le luxe d'une embellie dans les sondages. Et plusieurs socialistes ont dû admettre que certaines décisions du président - le nouveau Revenu de solidarité active, la fiscalité écologique sur les véhicules - n'étaient pas si mauvaises.

Spectacle pathétique

Alors, les socialistes broient du noir. «Si l'on s'en tient au spectacle de La Rochelle, le PS confirme qu'il est bien malade, estimait ce week-end Benoît Hamon, un représentant de l'aile gauche. Le pire à nos yeux, ce qui nous navre et qui nous consterne, c'est à quel point le parti donne le sentiment d'avoir abandonné les gens.»

Car une fois de plus, les combinaisons entre chefs, les rapprochements esquissés puis abandonnés, les trahisons minuscules ont occulté les débats de fond. Le spectacle le plus pathétique a peut-être été celui de Pierre Moscovici, candidat au leadership socialiste face à Ségolène Royal et Bertrand Delanoë. Lâché par l'un de ses alliés de la veille, Jean-Christophe Cambadélis, il a longuement dénoncé sa duplicité, samedi devant la presse, avant de promettre qu'il serait «le premier secrétaire de l'intérêt général».

Ces péripéties occultent un problème plus grave, l'incapacité du PS à clarifier sa pensée économique. Entre ceux qui fustigent la «délinquance patronale» et ceux qui veulent se réconcilier avec l'entreprise, entre ceux qui croient à la relance keynésienne et les partisans de la rigueur financière, entre ceux qui insistent sur la redistribution des richesses et ceux qui pensent d'abord à leur production, les désaccords ne manquent pas. Mais personne ne sait quand, ni comment ils seront résolus.

A défaut de s'entendre sur l'essentiel, les socialistes communient dans une vision pessimiste du monde. «La France va mal, nos concitoyens n'en peuvent plus», expliquait vendredi un fidèle de Ségolène Royal. «Cette rentrée est la plus épouvantable pour les Français depuis plus de dix ans», ajoutait Jean-Christophe Cambadélis, l'organisateur de la réunion de La Rochelle. A longueur de discours, la mondialisation a été décrite comme une machine infernale, broyant le «modèle social» de l'Hexagone et répandant la misère sur la planète. Voilà qui ne va pas remonter le moral, déjà mal en point, des socialistes français.