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Le sort du Schleswig-Holstein est entre les mains de deux élus de la minorité danoise

A peine 50 000, les Allemands d'expression danoise pourraient donner leur soutien aux perdants sociaux-démocrates. La CDU enrage

Avec ses deux députés seulement, le minuscule parti danois du Schleswig-Holstein est en passe de priver la CDU de sa victoire aux élections régionales de dimanche dernier. Ce qui provoque la colère des dirigeants nationaux de l'opposition, même si rien n'est encore décidé. Si les deux voix de la minorité danoise devaient permettre à la coalition rose-verte de conserver le pouvoir, «ce serait un abus de son statut privilégié», s'est étranglé le député chrétien-démocrate Wolfgang Bönrsen alors que le chef du groupe parlementaire fédéral de la CDU, Norbert Röttgen, estimait que, n'ayant pas atteint le quorum de 5%, «le SSW n'est pas légitimé à former un gouvernement majoritaire».

Au lendemain des élections régionales, alors que la coalition SPD-Verts emmenée par la ministre-présidente Heide Simonis avait perdu près de 5% de ses électeurs et ne disposait plus que de 33 sièges contre 34 à l'alliance chrétienne-libérale de Peter Harry Carstensen, le Land s'est retrouvé sans aucune majorité. Il ne s'en est fallu que de 757 voix d'ailleurs que la CDU obtienne la majorité absolue de 35 sièges avec son allié libéral.

Très vite la cheffe de file du parti danois, Anke Spoorendonk, «la faiseuse de roi» comme on l'appelle désormais, déclarait que sa formation «pouvait très bien tolérer un gouvernement minoritaire». Les premiers contacts avec le SPD ont mis en évidence des points de convergence, en politique sociale notamment. Alors que, pour sa part, «la CDU devrait faire un virage à 180 degrés pour négocier avec nous», avertissait Anke Spoorendonk.

Ecole unique

C'est que sur le point qui tient le plus au cœur de la minorité, l'école, il y a parfaite convergence de vues avec la coalition rose-verte. Après le traumatisme provoqué par l'enquête PISA révélant le faible niveau de l'enseignement, Heide Simonis est prête à reprendre le modèle nordique de l'école intégrée, l'école unique. Un modèle dans lequel l'enseignante d'histoire et d'allemand Anke Spoorendonk a fait ses études, mais contre lequel Peter Harry Carstensen avait mené sa campagne.

Lorsqu'en 1955 le chancelier Adenauer et le premier ministre danois Hans Christian Hansen signèrent la Déclaration de Bonn et de Copenhague, ils étaient loin de se douter que les quelque 50 000 citoyens allemands d'expression danoise tiendraient un jour le destin d'un Land tout entier entre leurs mains. Le traité prévoyait seulement des mesures de protection pour les minorités linguistiques respectives: allemande au Danemark et danoise en Allemagne. Plus précisément dans la partie allemande de l'ancien comté du Schleswig annexé par la Prusse lors de la guerre de 1860, alors que le Traité de Versailles devait restituer le nord du comté au Danemark en 1919.

La majorité des enfants de la minorité danoise sont formés, jusqu'à leur entrée dans l'université ou en formation professionnelle, dans des écoles privées subventionnées par le Land, l'Allemagne et le Danemark. La plupart, comme Anke Spoorendonk, suivent leur formation universitaire à Copenhague.

Si la minorité est exemptée de l'obligation d'obtenir 5% des suffrages pour accéder au parlement du Land, estime Norbert Röttgen, qui souhaite la neutralité du SSW, «c'est uniquement pour représenter une composante linguistique minoritaire dans le pays». Les «élus danois» s'offusquent, eux, de ce statut de député «demi-portion» que la CDU voudrait leur infliger. Signe de la désorientation des vainqueurs de dimanche, ils seraient même prêts à intégrer le SPD dans une large coalition, «y compris avec Heide Simonis».