Etat déliquescent
Les combats ont débuté lundi en début de soirée: des militaires de l’ancienne garde présidentielle ont lancé leur offensive depuis leur camp de parachutistes situé au centre de Bamako. Après avoir occupé l’ORTM, ils ont dû reculer face aux militaires du CNRDE, qui, à 3h30 du matin, déclaraient sur les ondes de la télévision qu’ils «maîtris [aient] la situation». Dans la matinée cependant, des tirs sporadiques continuaient à retentir au centre de Bamako. Les affrontements auraient débuté alors que les bérets rouges s’opposaient à l’arrestation de l’un des leurs, Abidine Guindo, ancien chef d’état-major particulier d’ATT, selon certaines sources. Une version contestée par des membres de la junte, qui évoquent pour leur part une offensive planifiée depuis longtemps, impliquant des mercenaires étrangers.
Le ministre de la Communication Hamadoun Touré déclarait mardi après-midi que «le premier ministre et son gouvernement […] prennent toutes les mesures appropriées en vue de la restauration de la normalité». Mais les événements qui agitent Bamako relèguent plus que jamais le gouvernement de transition, présidé par Dioncounda Traoré, à l’arrière-plan. Alors que la junte a été officiellement dissoute après avoir accepté, le 6 avril, de céder le pouvoir à de nouvelles instances civiles, elle n’a jamais effectué de réel retrait à leur profit, même si ses représentants affirment que le pouvoir est entre les mains de l’exécutif en place. «Les derniers événements révèlent un affaiblissement dramatique de l’Etat malien, à la fois sur le plan politique et militaire, souligne Gilles Yabi, directeur du programme Afrique de l’Ouest d’International Crisis Group. L’actuel président par intérim est largement associé à l’ancien régime d’ATT, ce qui nuit à sa légitimité, et l’armée est divisée. Il faudra attendre l’issue définitive des affrontements entre les parachutistes et la junte pour savoir si celle-ci a réussi à imposer sa loi au sein même de l’armée.»
En attendant, les convulsions qui agitent les forces étatiques donnent le champ libre aux rebelles du Nord pour consolider leur emprise, sans menace de contre-offensive et sans la contrainte d’un dialogue politique à mener avec le gouvernement.