Tour de vis social en Espagne
Austérité
José Luis Zapatero impose une rigueur inattendue en réduisant les salaires des fonctionnaires et en coupant dans les dépenses sociales. Les syndicats menacent de mobiliser les Espagnols
Le front plissé et les cernes creusés, un José Luis Rodriguez Zapatero sinistre a engagé mercredi à la Chambre des députés ses compatriotes à accomplir «un effort extraordinaire». Accusé d’avoir trop tardé à admettre la gravité de la crise qui ébranle l’Espagne depuis fin 2007, le chef du gouvernement avait amorcé cet hiver un virage vers l’austérité.
15 milliards additionnels
Son administration s’était engagée à économiser 50 milliards d’euros pour réconcilier le déficit budgétaire (10,4% attendus cette année après 11,2% en 2009), creusé par l’écroulement des rentrées fiscales et l’envolée des prestations chômage, avec les critères de Maastricht d’ici à 2013 (3%). Acculé par la pression des marchés, celle de ses pairs européens à Bruxelles le week-end passé, et même d’après les médias espagnols par les injonctions de Barack Obama et du premier ministre chinois, Wen Jiabao, le premier ministre socialiste a décidé d’épargner 15 milliards additionnels. Il rompt, par la même occasion, la promesse réitérée avec constance de ne pas rogner les dépenses sociales.
Le préambule du nouveau plan d’économies a beau claironner que «les piliers de l’Etat providence ne seront pas affectés», les neuf mesures qui l’étaient sont d’une sévérité imprévue. La plus spectaculaire d’entre elles est la baisse de 5% de la masse salariale dans la fonction publique dès cette année, et son gel en 2011. Les membres du gouvernement sont eux aussi symboliquement mis à la diète: leur rémunération diminuera de 15%. Le «chèque bébé», une mesure que Zapatero avait fait voter en 2007 et qui octroyait aux familles 2500 euros à chaque naissance, disparaît. La revalorisation des pensions est gelée. Même l’aide publique au développement, dont s’honore l’Espagne, est amputée de 600 millions d’euros.
Jusque-là, en dépit de la montée du chômage (20% de la population active), les Espagnols ont enduré la crise sans descendre dans la rue. Jeudi, les syndicats, qui accusent le premier ministre de mettre en péril le dialogue social, ont appelé à manifester le 20 mai prochain. Le grand syndicat UGT a également appelé à une grève générale le 2 juin dans la fonction publique.