«En l’emprisonnant, le gouvernement voulait l’empêcher de couvrir les attaques de drones», estime Abderrahman Barman, son avocat. Tout commence le 19 décembre 2009. Le village d’Al-Majalah est bombardé. Le gouvernement yéménite assure qu’il a visé un camp d’entraînement d’Al-Qaida.
«Abdulelah Shaye a pu se rendre sur place et il a publié la photo des victimes: parmi elles, 14 femmes et 21 enfants. Cela a provoqué la colère des Yéménites», raconte Abderrahman Barman.
Soutien présumé à Al-Qaida
Autre surprise, des débris de missiles désignent les Etats-Unis. Il s’avérera que l’attaque a été menée depuis un navire de guerre dans le golfe d’Aden. En janvier 2010, un câble diplomatique révélé par WikiLeaks relate une conversation entre le général américain David Petraeus et le président yéménite Ali Abdullah Saleh. Ce dernier se plaint de l’utilisation des missiles de croisière, leur préférant les drones, plus précis. «Nous continuerons à dire que ce sont nos bombes, pas les vôtres», annonçait l’ancien président yéménite.
Le masque est aujourd’hui tombé. En partie grâce à Abdulelah Shaye. Le journaliste l’a payé au prix fort. En janvier 2011, il a été condamné à 5 ans de prison, accusé d’avoir apporté son soutien médiatique à Al-Qaida. «Grâce à ses contacts, Abdulelah Shaye avait publié plusieurs interviews de cadres du réseau. Les services de sécurité lui ont demandé de collaborer avec eux. Comme il a toujours refusé, ils se sont vengés», explique Marwan Dammaj, secrétaire général du syndicat yéménite des journalistes.
Bon prince, le président Saleh avait gracié le journaliste quelques semaines plus tard. Mais Barack Obama avait personnellement téléphoné à son homologue pour s’en inquiéter. Abdulelah Shaye n’a finalement été libéré que le 23 juillet dernier.
* 18h30, Centre œcuménique, à Genève.