Un limogeage pour sauver les accords de Dayton
BOSNIE
En destituant mercredi soir le Croate Ante Jelavic de la présidence collégiale, le haut représentant civil à Sarajevo, Wolfgang Petritsch, montre qu'il ne tolérera aucun dérapage mettant en danger la fragile cohésion multiethnique
«En limogeant Ante Jelavic, j'ai accompli mon mandat de protéger les accords de Dayton et la paix en Bosnie-Herzégovine. Le Croate de la présidence collégiale lance sans cesse des appels en faveur d'une partition de la Bosnie. La semaine dernière, il a chanté les louanges de deux criminels de guerre condamnés par le Tribunal pénal international (TPI).» C'est ainsi que le Haut représentant civil à Sarajevo, Wolfgang Petritsch, a expliqué, dans le Financial Times de jeudi, la mise à l'écart d'Ante Jelavic la veille au soir de la direction tripartite du pays. Apparemment, la goutte qui a fait déborder le vase, c'est l'appel lancé le week-end dernier par le nationaliste demandant aux Croates de cesser toute collaboration avec les autorités légales. Pour Wolfgang Petritsch, le dirigeant croate voulait clairement saper les accords de Dayton conclus en 1995, qui ont mis un terme à la guerre de trois ans.
Soulagement
C'est sans surprise donc que la décision du Haut représentant de l'ONU a été accueillie favorablement par les organisations internationales présentes dans les Balkans. «Depuis un certain temps, Ante Jelavic conduisait le peuple croate vers un cul-de-sac d'isolement et d'intolérance», a déclaré Douglas Coffmann, porte-parole de l'ONU à Sarajevo. Et d'ajouter: «Une fois de plus, nous voyons des leaders sans scrupule cacher leur intérêt personnel et leurs agissements illégaux sous le drapeau du nationalisme.»
Pour la Commission européenne, Ante Jelavic et ses alliés ont cherché à créer un sentiment d'instabilité et de crainte au sein de la population. «Ils conduisaient les Croates de Bosnie vers l'isolement. La communauté internationale ne peut permettre ces actions qui battent en brèche les accord de Dayton», a commenté Bruxelles.
Ante Jelavic n'a pas seulement été limogé de la présidence tripartite de Bosnie. Il est également interdit d'exercer toutes fonctions publiques ou des responsabilités dans un parti politique. Le nationaliste dirigeait le principal parti des Croates de Bosnie, la Communauté démocratique croate (HDZ). Le 3 mars, cette formation avait proclamé unilatéralement et en toute illégalité la création d'institutions autonomes, avec à terme leur propre parlement et leur propre gouvernement. «Le président Jelavic est tenu comme personnellement responsable par la communauté internationale pour cette provocation», avait déjà mis en garde Wolfgang Petritsch.