Une opposition toujours aussi décidée
Après avoir rejeté l’appel du régime «illégitime» au dialogue, la confrérie islamiste des Frères musulmans, honnie par le pouvoir, a estimé que les appels aux négociations «n’influeraient pas sur les rassemblements de masse prévus vendredi pour faire tomber le régime».
L’opposition, composée également de partis laïques et de mouvements issus de la société civile comme la Coalition nationale pour le changement qui s’est formée autour du Prix Nobel de la paix Mohamed ElBaradei, a fait du départ immédiat de M. Moubarak une condition pour négocier avec le régime.
M. Souleimane a estimé que cette demande équivalait à un «appel au chaos» et exhorté les manifestants à quitter la place Tahrir, épicentre de la contestation au Caire.
Dans la nuit de jeudi à vendredi, sur la place Tahrir, des milliers de manifestants ont de nouveau bravé le couvre-feu nocturne, campant sous des tentes et se réchauffant autour de feux, après une journée de heurts intermittents entre opposants et partisans de M. Moubarak.
Discours apaisant de Hosni Moubarak
Ce dernier, selon Mme Amanpour, a assuré en avoir «assez d’être président», disant vouloir «abandonner le pouvoir maintenant, mais qu’il ne pouvait le faire de peur que le pays ne sombre dans le chaos».
De son côté, le «New York Times»a assuré que Washington discute avec des responsables égyptiens des modalités d’un départ immédiat de Hosni Moubarak et du transfert du pouvoir à un gouvernement de transition dirigé par Omar Souleimane, un projet destiné à recueillir le soutien de l’armée égyptienne.
M. Moubarak avait dit mardi qu’il ne briguerait pas un sixième mandat lors de la présidentielle de septembre, mais cette annonce n’a pas apaisé la rue.
Dans le même temps, les autorités optaient pour la manière forte en arrêtant sept jeunes leaders du mouvement contestataire, après leur rencontre avec l’opposant Mohamed ElBaradei, selon des proches.
Au moins huit personnes ont été tuées et plus de 800 blessées mercredi et jeudi matin dans de violents heurts entre les deux camps. Plus de 300 personnes ont péri la première semaine de la contestation, selon un bilan non confirmé de l’ONU.
«Kill the messenger»
Des dizaines de journalistes étrangers ont été battus, interpellés ou intimidés ces deux derniers jours et aucune télévision n’a diffusé d’images en direct depuis la place Tahrir dans la nuit de jeudi à vendredi.
Un étranger dont on ignore la nationalité a été battu à mort non loin de là, selon des témoins et des services de secours.
Jeudi, des centaines de partisans du régime, armés de matraques, de couteaux et certains de pistolets, ont empêché pendant plusieurs heures l’entrée sur la place de renforts ou ravitaillement aux opposants qui y sont retranchés.
L’armée, épine dorsale du régime, surveille sans intervenir. Elle n’est intervenue que rarement pour disperser les protagonistes ou tenter de sauver des personnes agressées.
D’autres partisans du régime, postés sur le pont du 6 octobre, ont lancé des pierres et des bouteilles incendiaires sur les opposants. Des pavés et des bordures en pierre ont été utilisés comme projectiles et des barricades ont été érigées.
Le pouvoir a rejeté les accusations selon lesquelles il a orchestré les violences, montrant du doigt les Frères musulmans, principale force d’opposition.
L’Occident a dénoncé ces attaques. La secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton a condamné «dans les termes les plus fermes» les agressions contre les journalistes, appelant les forces de sécurité à les protéger. Elle a également appelé à des «négociations sérieuses» immédiates entre le pouvoir et l’opposition «en vue d’une transition pacifique et en bon ordre» en Egypte.
A Berlin, le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a jugé «scandaleuse et totalement inacceptable» la répression en Egypte contre les médias et les défenseurs des droits de l’homme.
Face à la situation alarmante, les dirigeants occidentaux maintiennent la pression sur M. Moubarak en appelant à une transition immédiate du pouvoir.