Vers un nouveau désarmement
nucléaire
Les Etats-Unis et la Russie ont repris fin 2009 leurs négociations à Genève en vue d’une réduction de leurs armements nucléaires stratégiques, pour remplacer le traité START arrivé à expiration le 5 décembre dernier. Tour d’horizon des forces nucléaires en présence et des enjeux
Les pourparlers russo-américains en vue d’aboutir à un nouvel accord de désarmement nucléaire pour remplacer le traité START expirant début décembre ont repris lundi 9 novembre à la mission russe de Genève. Quatre groupes de travail ont été créés, qui doivent se rencontrer en alternance à la mission russe et américaine pour quatre semaines.
Les présidents américain et russe, Barack Obama et Dimitri Medvedev, ont signé en juillet dernier à Moscou un accord préalable de désarmement nucléaire qui va servir de base à ces négociations, en vue de remplacer le traité START. «START I», conclu à la fin de la Guerre froide, expire le 5 décembre. Moscou a fait état jeudi d’une «proposition constructive» de la part de Washington, sans en préciser le contenu. En octobre, la Maison Blanche avait également parlé de «progrès».
■ Qui possède quoi? • Les Etats-Unis comptent 2200 ogives stratégiques déployées et un nombre comparable en réserve, selon l’Association américaine de contrôle des armements. • La Russie disposerait de 2000 à 3000 têtes opérationnelles et de 8000 en réserve ou en voie de démantèlement en raison de matériels obsolètes, selon les estimations disponibles. • Washington dispose de 1200 vecteurs nucléaires (missiles intercontinentaux, sous-marins et bombardiers stratégiques) et Moscou de 816, selon des données officielles communiquées en avril. ■ Quelles limites? • «START» désigne deux traités américano-soviétiques visant à réduire la totalité des arsenaux nucléaires des deux superpuissances (aussi bien les missiles terrestres que sous-marins et aériens). • START fait suite aux Strategic Arms Limitation Talks (SALT), signés par les deux mêmes pays en 1972 et 1979, qui fixaient aux armes stratégiques offensives des plafonds supérieurs aux niveaux que celles-ci avaient atteints: ils autorisaient donc leur développement, mais limité. START vise quant à lui à la réduction de ces armes. • Le traité START I (Strategic Arms Reduction Talks ou Entretiens sur la réduction des armes stratégiques) a été signé le 31 juillet 1991 à Moscou par Mikhaïl Gorbatchev, alors président de l’URSS, et le président américain George Bush père. Effort de désarmement nucléaire le plus ambitieux, il a conduit à une réduction des arsenaux stratégiques des deux pays de 10 000 à moins de 6000 têtes nucléaires et limité à 1600 le nombre de leurs vecteurs. Il prendra fin le 5 décembre prochain. • Signé en 1993, START II prévoit une réduction des arsenaux stratégiques au terme de laquelle chaque partie ne devra pas disposer de plus de 3500 têtes nucléaires stratégiques. Il sera aussi caduc le 5 décembre. • En 2002, Washington et Moscou ont signé le Traité de réduction des arsenaux nucléaires stratégiques (SORT) qui prévoit un plafond compris entre 1700 et 2200 têtes nucléaires déployées et opérationnelles d’ici à 2012 pour chacun des deux Etats. ■ Quelles avancées? Lors d’un sommet début juillet 2009 à Moscou, Dimitri Medvedev et Barack Obama ont décidé d’abaisser le nombre de leurs têtes nucléaires et le nombre de vecteurs nucléaires. Mais les plafonds exacts de réduction restent encore à négocier à Genève, de même qu’un certain nombre d’autres paramètres. Les présidents russe et américain ont fixé des objectifs chiffrés aux négociateurs pour la poursuite de leurs discussions: • Réduction dans une fourchette de 1500 à 1675 du nombre de têtes nucléaires déployées dans chaque pays. • Réduction dans une fourchette de 500 à 1100 du nombre de vecteurs nucléaires (missiles intercontinentaux, embarqués à bord de sous-marins et bombardiers stratégiques). • Ces réductions doivent intervenir dans un délai de sept ans après l’entrée en vigueur du traité. • Le futur traité aura une durée de dix ans. • Les négociateurs doivent aboutir «très prochainement» à un accord final qui puisse être signé et ratifié. ■ Quels risques de blocage? • Le principal point d’achoppement concernait jusqu’à récemment le bouclier antimissile américain en Europe de l’Est. Mais le renoncement à ce projet de la part des Etats-Unis en septembre dernier constitue une sérieuse avancée. Par ailleurs, Barack Obama a refusé de lier ce projet antimissile aux négociations START, comme le réclame Moscou, mais a jugé possible une coopération avec les Russes contre les menaces balistiques. • Moscou exige une prise en compte des têtes nucléaires stockées et non pas seulement de celles qui sont déployées, les Etats-Unis ayant une supériorité de fait en la matière. • Moscou souhaite également limiter le nombre de missiles intercontinentaux américains équipés de charges conventionnelles, craignant d’en être la cible.