Avalanche de haine
«Rejoignez notre époque, rejoignez l'Allemagne et enlevez votre foulard», avait suggéré la députée verte de 35 ans aux femmes turques dans une interview au grand quotidien populaire Bild. Le foulard n'est pas l'expression d'une croyance religieuse personnelle ni une pièce de mode comme le croient naïvement les jeunes musulmanes, disait Ekin Deligöz, mais le symbole des femmes dépourvues de droits.
Bien que cette jeune députée de Souabe s'inscrive dans la longue tradition du laïcisme turc, sa prise de position a déclenché une avalanche de haine. Elle a reçu des messages d'injures, mais aussi des menaces de mort. Même le Conseil islamique, une des principales organisations musulmanes du pays, l'a vertement critiquée. Au point que, la semaine dernière, le président du Bundestag a été contraint de rappeler que ces menaces et injures constituent «une attaque grave contre l'une des valeurs centrales de notre ordre constitutionnel», la liberté d'expression.
«J'aurais souhaité davantage de solidarité de la part des démocrates musulmans, mais ils m'ont dit que j'étais seule responsable de ce qui m'arrivait», regrettait Ekin Deligöz.
Invitées mardi par les Verts pour débattre du cas, les cinq principales associations musulmanes ont condamné les menaces proférées contre la députée. Mais elles ont aussi renouvelé leurs critiques. La communauté turque a qualifié ses propos de «populistes» et d'«insensés». Le Conseil islamique estime pour sa part que demander aux enseignantes musulmanes de retirer leur foulard est une marque de discrimination.
D'autres femmes d'origine musulmane, comme l'avocate Seyran Ates, agressée dans la rue pour avoir défendu en justice une femme battue, ont, elles aussi, été victimes ces derniers mois de l'intolérance montante.