C’est le volet du plan de secours européen qui reste le plus obscur aux yeux des citoyens européens. Pour les milieux financiers, c’est certainement le plus crucial. La Banque centrale européenne a décidé dimanche soir de racheter les emprunts des pays de la zone euro en difficulté. Une décision qui la place sur le chemin suivi par ses homologues américaine et britannique: face à la menace d’implosion de leur système bancaire, celles-ci avaient été contraintes en 2008 de recourir à cette solution En dépit du risque que de tels rachats, par une institution battant monnaie, ne se traduisent tôt ou tard par de l’inflation. Une menace qui explique la longue opposition de la BCE à une telle extrémité. Véritable volte-face, de tels achats «comportent des risques considérables», a prévenu Axel Weber, membre du conseil des gouverneurs de la BCE, dans les colonnes de Börse Zeitung.

Débloquer les marchés

«La perte de confiance et les problèmes de liquidité qui ont étreint le marché interbancaire la semaine dernière ont conduit la BCE à choisir le pragmatisme», justifie Christian de Boissieu, président du Conseil d’analyse économique auprès du gouvernement français.

But de cette manœuvre opérée par une institution dont les statuts ne permettent pas de soutenir directement la Grèce? Débloquer le marché sur lequel s’échangent ses emprunts et dont les acheteurs avaient disparu, ce qui amplifiait les paris des fonds spéculatifs. Ceci afin de permettre au pays de continuer à s’y financer. Autre objectif, permettre aux banques européennes de transférer une partie du risque lié à ces emprunts remplissant leurs coffres.

Menace inflationniste

La vague d’achats «a commencé lundi matin», a confirmé le président de la BCE, Jean-Claude Trichet. Aucun montant n’a été précisé sur l’ampleur du programme de rachat. «Les achats réalisés [lundi] visent à impressionner les investisseurs», estime Ciaran O’Hagan, spécialiste de la Société Générale à Paris.

La question cruciale reste de savoir comment seront financés ces rachats. C’est-à-dire quelles seront ces «opérations spéciales» mentionnées par la BCE qui seront mises en place afin de les «stériliser», afin d’empêcher qu’ils ne viennent nourrir l’inflation. Aux yeux de Christian de Boissieu ceci pourrait se faire «dans le temps, par des cessions de titres» détenus par l’institution de Francfort.