En slalomant d'une chaîne à l'autre, en passant d'une promesse de grand spectacle à l'espoir d'un beau suspense, en zappant d'un match nul à un match médiocre, rien ne se produit de ce que l'on m'avait promis dans les journaux: ni tension, ni émotion; ni joie, ni colère. Rien. La Coupe du monde de football, malgré toute l'inflation promotionnelle, intellectuelle, médiatique, dont elle bénéficie me laisse froide. Du moins pour l'instant. J'attendrai donc ce soir pour éprouver enfin quelque chose – certainement un extrême agacement – puisque la France jouera contre l'Afrique du Sud et que je suivrai le match sur France 2, la chaîne forcément chauvine.
Mais avant d'en arriver là, une question me taraude: de quoi sera faite cette chronique? La réponse m'est donnée à 19h30 quand Darius Rochebin ouvre le TJ avec un exploit médical doublé d'une formidable histoire d'amour entre deux enfants roumains: Horatio a sauvé de la mort son frère jumeau Octavio en lui donnant une partie de son intestin. L'opération s'est déroulée à l'Hôpital cantonal de Genève. Et les deux enfants amaigris d'exprimer dans leur chair le bonheur d'être encore vivant. Vivant ensemble.
Comme l'a dit le donneur devant la caméra: «Je n'aurais pas pu vivre sans mon frère (...) il est une partie de mon cœur». Sans le savoir, le petit garçon rappelait qu'il n'y a pas de métaphore sans une certaine littéralité. J'en ai eu le frisson. La Coupe du monde est une péripétie mesquine face à un lit d'hôpital.