Qui sont les chanteurs populaires? les hommes ou les femmes politiques d'influence? les comédiens charismatiques? Pour le savoir, il suffit de faire appel aux imitateurs. Jean-Luc Delarue l'a bien compris qui, hier soir, avait imaginé un plateau composé que de Dolly du show-business: Yves Lecoq, Sandrine Alexi, Patrick Adler, Frédéric Lebon et Bruno Boniface. La demi-heure passée en leur compagnie fut exquise. Bien plus qu'elle ne l'aurait été si, sur le plateau, avaient réellement coexisté Céline Dion, Serge Lama, Jean-Marie Le Pen, Jane Birkin, Brigitte Bardot ou Gilbert Montagné. Parce que les imitateurs, quand ils sont bons – c'est-à-dire à la fois crédibles et excessifs –, ne mettent en spectacle que le meilleur, sous-entendu le pire, de leur modèle: un tic, un travers, un handicap, un accent, une posture, une gestuelle, une manie. L'exercice est cruel, forcément, puisqu'ils ignorent la règle pour l'exception. Dalida ne sera que strabisme, Francis Cabrel que moustache gascogne, Aznavour que lèvre inférieure, Adamo que postiche, Christine Ockrent que chuintement. Le modèle se perd dans le détail de son imperfection. C'est son ridicule et sa grandeur.

Que l'on adore le modèle singé ou qu'on le déteste n'a strictement aucune importance. L'imitation ne sert pas ni à faire aimer ni à faire haïr l'objet dont on se moque, juste à transformer un être singulier en fétiche public. En d'autre terme: à créer de la future mémoire collective.