Le tohu-bohu et le début de panique des marchés financiers la semaine dernière étaient loin d’être irrationnels. L’absence de perspectives de déblocage dans la crise de la dette de plusieurs Etats européens commençait en effet à paralyser petit à petit le crédit entre banques, comme l’a montré l’intervention lundi de six banques centrales, dont celle de la Suisse. En clair, comme au moment de la faillite de Lehman Brothers, les établissements financiers commençaient à craindre que les banques qui leur empruntaient des liquidités ne soient pas en mesure de rembourser.

Techniquement, cette défiance s’observe par le taux auquel se prêtent les banques entre elles, le Libor. Après treize séances de hausses consécutives, ce taux à trois mois sur le dollar était revenu vendredi à son plus haut depuis le 17 août dernier, à 0,428%. Certes bien loin des 4,8% affichés à l’automne 2008, mais à un niveau tout de même presque doublé en moins de deux semaines. Le spectre du risque systémique – le fameux «trop grand pour faire faillite» – se matérialisait à nouveau clairement.

Washington, qui considérait jusqu’à ces développements que la crise de l’endettement était purement européenne, a alors réagi. Le président américain Barack Obama a appelé à deux reprises la chancelière allemande Angela Merkel ce week-end pour lui demander de prendre des mesures «énergiques» pour débloquer la situation. Ces mesures, ce sont les 750 milliards d’euros posés sur la table par le FMI et l’UE.

Action concertée

Parallèlement, les banques centrales américaine, européenne, britannique, canadienne et suisse ont annoncé dans la nuit de dimanche à lundi qu’elles réactivaient un accord permettant d’alimenter les banques en liquidités avec tous les dollars nécessaires, sans aucune restriction de montant. La Banque du Japon devrait se joindre à la manœuvre, basée sur un échange de devises (swaps d’euros contre des dollars). La première opération sera conduite ce mardi.

«Cette annonce laisse supposer que certaines banques accusent des pertes dans leurs bilans», observe Sergio Rossi, professeur de politique monétaire à l’Université de Fribourg. «La crise de la dette à laquelle nous assistons ne concerne pas que les Etats. Ménages et entreprises des pays en difficulté – outre la Grèce, il y a l’Espagne, le Portugal, et dans un deuxième temps peut-être aussi l’Italie et la France – peuvent aussi présenter des risques de défaut», conclut-il.