Attendu fin 2014, le casque Oculus Rift plongera le joueur dans la réalité virtuelle

Innovation Un nouvel outil permet une immersion totale dans le jeu vidéo

Sans être encore tout à fait au point, l’Oculus Rift séduit

A ce jour, il s’agit peut-être de l’expérience la plus comparable à une téléportation.

Il suffit de prendre place dans un fauteuil de bureau et d’enfiler l’Oculus Rift – sorte de masque de ski connecté à un ordinateur. Un clic de souris permet ensuite au participant de se retrouver dans un autre monde.

En lieu et place du fauteuil, l’on se retrouve au cœur d’une mine obscure, assis dans un petit chariot en bois roulant sur un rail. En prenant de la hauteur, il suffit d’un coup d’œil vers le bas pour être pris de vertige: des dizaines de mètres séparent le cobaye d’un sol dur en pierre. Soudain, le rythme s’emballe. Le chariot glisse sur les rails et entame une folle course à la manière d’un grand huit. Grâce à un gyroscope, l’appareil perçoit les mouvements de la tête et adapte en conséquence l’image diffusée à l’intérieur du casque. L’immersion dans cette réalité virtuelle est si époustouflante qu’on oublie rapidement cette installation d’environ 300 gram­mes sanglée sur la tête.

Quelques clics suffisent pour se retrouver subitement en plein Far West. Armé jusqu’aux dents (grâce à une manette de console ou une souris et un clavier), il s’agit de guetter les environs pour découvrir l’ennemi et l’abattre avant qu’il ne puisse dégainer. Le temps d’ouvrir un nouveau programme et l’on se trouve aux commandes d’un avion qui survole un paysage désertique. L’expérience coupe le souffle.

Et le retour à la réalité est assez brutal. Si, dans le sous-sol du Qwertz (un bistrot au cœur de Lausanne qui propose de tester ce casque de réalité virtuelle), le cobaye reprendra vite ses esprits, son estomac mettra par contre davantage de temps à digérer le voyage. «Les premières fois, on a un peu l’impression de passer dans une centrifugeuse», reconnaît Nicolas Vidmer. Ce télématicien de 27 ans, qui prête son casque au Qwertz, est l’un des pionniers romands de l’Oculus Rift.

En 2012, alors que le projet n’en était encore qu’à ses balbutiements sur Kickstarter – site internet de financement participatif –, Nicolas Vidmer a déboursé quelque 300 dollars pour être l’un des premiers à obtenir le casque: «Au début, il n’y avait que quelques vidéos de démonstration. Et puis, certains jeux ont été portés sur ce support.» Ceux qui ont soutenu Palmer Luckey, le jeune prodige californien à l’origine du projet, ont, ensemble, rassemblé plus de 2,5 millions de dollars. Et se sont ainsi procuré une version de développement de l’outil avant sa commercialisation par la société Oculus VR, officiellement attendue pour fin 2014. «Il y a encore des bugs et la résolution des écrans de la version finale devrait être meilleure», estime Nicolas Vidmer. Si l’on imagine sans peine les milliers de possibilités qu’offre un tel appareil (formation, lutte contre les phobies, etc.), l’objectif déclaré de ce casque est résolument ludique.

«Tous ceux qui l’essayent sont bluffés», relève l’universitaire Maurizio Rigamonti. Le chargé de cours à l’Université de Fribourg (design et programmation graphique de jeux vidéo), qui a lui-même déjà testé l’Oculus Rift l’an dernier en Allemagne, ne parle pas encore d’une étape franchie dans l’histoire du jeu vidéo. «Mais le potentiel est là, explique le docteur en informatique. Et le prix de l’appareil sera accessible [300 dollars]… A voir comment réagira le marché lors de sa sortie.»

Dans la foulée, l’expert rappelle que le concept de l’Oculus Rift n’est pas nouveau: «L’objectif des jeux vidéo a toujours été d’incarner quelqu’un d’autre, de plonger dans un univers différent de notre réalité quotidienne. Tous les grands développements du jeu vidéo – et l’Oculus Rift en fait partie – vont vers davantage d’immersion…»

Restent à régler les problèmes de cinétose (ou mal des transports, que l’on ressent lors des «voyages» avec l’Oculus Rift). Deux pistes sont avancées pour expliquer ce phénomène. D’abord, les quelques microsecondes qui séparent les mouvements effectués par la tête du déplacement perçu dans le casque peuvent perturber. Autre inconvénient: le fait que le cerveau doit être convaincu d’être en déplacement alors que le corps reste, lui, immobile.

Selon Nicolas Vidmer, ce sentiment passe après quelques heures d’utilisation. «Les pionniers du train avaient aussi mal au ventre», rappelle Didier, un enthousiaste, en enfilant son casque pour partir explorer une station orbitale. Assis sur son fauteuil de bureau. 

Le café Qwertz propose une nouvelle démonstration mercredi soir 5 février. Plus d’infos: www.qwertz.gg

«Le prix de l’appareil [300 dollars] devrait le rendre accessible au plus grand nombre»