Opportunités
Les stratégies «smart beta» se basent sur le principe de la diversification pour surperformer les indices traditionnels grâce à une meilleure allocation des risques et une gestion systématique, transparente et efficace en termes de coûts. Par Matthias Gäutman et Alexandre Deruaz (Solutions Group, Lombard Odier)
Si les bienfaits de la diversification de portefeuille n’ont plus à faire leurs preuves, celle-ci est souvent absente des indices et des gestions traditionnels, qui restent concentrés sur certaines zones géographiques, certains secteurs ou même certains titres. Ainsi, les stratégies dites «smart beta» permettent de saisir un plus large champ d’opportunités, notamment à travers les pays émergents. Cette stratégie est particulièrement bien adaptée à l’évolution des marchés, y compris la situation actuelle pour les actions, qui s’annoncent sous le meilleur jour après l’excellent cru de 2013. C’est en tout cas ce que les investisseurs pourraient penser en lisant la presse en ce début d’année.
Mais il faut prendre garde à distinguer les sources de rendements en 2013. En effet, ceux-ci ont été inégaux d’un segment de marché à l’autre. Les sociétés des marchés développés ont globalement généré une performance de 23%, les sociétés américaines en tête avec 28% de performance. A l’opposé, parmi les pays émergents, la Chine a dégagé 1%, la Russie a perdu – 2%, l’Inde – 7% et le Brésil – 18%!
Au niveau sectoriel, on constate que les actionnaires ayant investi dans la consommation discrétionnaire, les technologies de l’information ou la santé ont bénéficié d’une performance moyenne supérieure à 30%. Alors que ceux qui étaient exposés à d’autres secteurs comme les matériaux, pourtant indispensables aux sociétés modernes, n’ont pas été rémunérés pour leur prise de risques. Comme les indices traditionnels sont justement concentrés sur les segments gagnants, au total l’investisseur moyen en actions internationales a très largement profité des bonnes performances évoquées ci-dessus.
2013: concentration du capital payante. Quid de 2014?
S’il est aisé d’analyser le passé, prédire le futur tient plus de la charade. Mon premier dit qu’il ne faut pas placer tous ses œufs dans le même panier. Mon deuxième dit que la performance passée n’est pas une garantie du futur. Le tout suggère que le seul «free lunch» en finance serait la diversification.
Or, les stratégies «smart beta», et plus spécifiquement l’approche Risk Parity, s’intéressent justement aux aspects de diversification et cherchent à surperformer les indices traditionnels grâce à une meilleure allocation des risques et une gestion systématique, transparente et efficace en termes de coûts. Cela permet non seulement de réduire les risques mais aussi de mieux profiter de l’ensemble des opportunités offertes par le marché.
Fondamentalement, les investisseurs sont rémunérés pour une prise de risques. Donc le risque devrait se trouver au cœur du processus de construction, par opposition à la capitalisation boursière. Supposons en effet deux titres qui auraient exactement la même capitalisation boursière. L’approche traditionnelle reviendrait à allouer la même somme d’argent à chacune. Mais qu’advient-il si la première société génère des revenus et des dividendes stables alors que la deuxième ne repose que sur la supposition de l’éventuelle acceptation d’un nouveau médicament par les autorités de régulation? La deuxième société comporte évidemment plus de risques. C’est pourquoi l’investisseur souhaitant diversifier le risque allouera plus d’argent à la première société au détriment de la seconde, afin d’égaliser leur contribution respective au risque global du portefeuille. Cette philosophie d’investissement est propre aux approches Risk Parity.
Le risque de marché peut être en fait analysé de manière plus systématique. Dans le cas des marchés émergents, il s’agit du risque pays. La diversification est donc obtenue en allouant le même budget de risque à tous les pays. Tendanciellement, cela revient à réduire la concentration de capital sur le trio que forment la Chine, la Corée du Sud et Taïwan, et à profiter d’opportunités telles que la Malaisie, la Pologne ou le Mexique – pour ne citer qu’eux parmi une vingtaine d’autres pays.
Dans le cas des marchés développés, la région et les secteurs contribuent aux risques systématiques dominants. L’égalisation de ces contributions revient à réduire l’exposition à l’Amérique du Nord, augmenter celle du Japon et ajuster celle de l’Europe afin d’avoir une exposition au risque égale entre les différentes régions. En termes de secteurs, on retrouve également une pondération plus équilibrée, en augmentant notamment l’allocation à des secteurs moins risqués, tels que les services aux collectivités, ou en réduisant les plus risqués, comme les institutions financières.