Hier, Tim Berners-Lee donnait une conférence dans l'endroit qui l'a rendu célèbre. L'inventeur du Web était en effet au CERN

à Genève, là où il développait en 1989 un serveur d'information en hypertexte pour améliorer la communication entre les chercheurs, sans savoir que son idée allait s'appliquer rapidement au plus grand réseau du monde.

Devenu chercheur au MIT à Boston, Tim Berners-Lee dirige d'autre part le World Wide Web Consortium, un groupe qui met en place les standards informatiques utilisés sur Internet. Selon lui, le Web doit passer la vitesse supérieure et devenir plus efficace. Dans ce but, les ordinateurs doivent enregistrer plus de données relatives au contenu publié sur le réseau, autrement dit de la «méta-information». «Lorsqu'une image de voiture jaune apparaît dans une page, le contenu de l'image ne sera répertorié nulle part et il sera donc impossible de la retrouver, explique-t-il. Si l'on ajoute de manière invisible un descriptif de cette image, ainsi qu'un catalogue de groupes de personnes qu'elle pourra intéresser, les moteurs de recherche deviendront beaucoup plus performants.»

En ajoutant de l'information sur l'information, il sera possible de structurer le réseau et de définir beaucoup plus précisément des barrières entre les sites. Ce système aidera par exemple les parents à définir des zones autorisées de navigation pour leurs enfants en fonction de paramètres précis. Berners-Lee imagine que la méta-information contiendra aussi des critères qualitatifs, décernés par exemple par des organes indépendants. On pourra alors sélectionner uniquement les sites agréés par telle ou telle autorité (intellectuelle, culturelle, médiatique) et s'assurer ainsi de la crédibilité de leur contenu.

D'autre part, les agents électroniques, ces programmes informatiques qui effectuent des recherches ou des actions automatiquement, pourront enfin devenir utiles: «L'accès aux bases de données n'est pas standardisé et il n'est par exemple pas possible aujourd'hui de comparer le prix d'un livre automatiquement entre toutes les cyberlibrairies, ajoute Tim Berners-Lee. Lorsque l'information aura la même structure partout, le monde entier deviendra une gigantesque base de données.»

Tim Berners-Lee ne comprend pas l'attitude de certains Européens, qui craignent que le développement du réseau n'uniformise la culture mondiale autour de celle du McDonald's. Pour lui, le progrès technologique va justement dans l'autre sens. «La technologie permet justement de filtrer le contenu en fonction des langues ou des intérêts, dit-il. Brancher toutes les cultures du monde ensemble, on ne sait pas ce que ça donne. C'est à nous tous de savoir ce que nous voulons faire avec cette «place de jeu»: l'utiliser pour la paix, la guerre, la pornographie ou la culture.»