Abdelwahab Meddeb, la culture plus forte que l’épée
Biographie express d’Abdelwahab Meddeb, romancier, essayiste et professeur, qui appelait sans relâche à protester contre les horreurs perpétrées au nom du Coran
La culture plus forte que l’épée
On l’appelait le Voltaire du monde arabe, et il goûtait volontiers le compliment. Abdelwahab Meddeb, qui fut romancier, essayiste, poète, professeur de littérature comparée et animateur de l’émission Cultures d’Islam sur France Culture, est mort le 6 novembre dernier des suites d’un cancer à l’âge de 68 ans. Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce grand lettré élevé dans la tradition religieuse en Tunisie et attiré par la voie soufie d’Ibn Arabi ne mâchait pas ses mots sur les dérives intégristes de l’islam contemporain. Quand il écrivait que l’islam est rongé par une «maladie» (La Maladie de l’Islam, Seuil, 2002) et que les germes sont dans le texte lui-même (lire son interview dans Libération du 23.09.2006), ou encore lorsqu’il appelait les musulmans, dans sa dernière tribune, à protester contre les horreurs perpétrées au nom du Coran (Le Monde du 09.10.2014), c’était toujours non pas en pourfendeur, mais en amoureux éperdu de l’islam. Abdelwahab Meddeb se disait chanceux de «s’inscrire dans une généalogie à la fois arabe, islamique, maghrébine, tunisienne, européenne, française». Auteur de Contre-prêches (Seuil, 2006), Sortir de la malédiction, l’islam entre civilisation et barbarie (Seuil, 2008), d’une Histoire des relations entre juifs et musulmans des origines à nos jours (Albin Michel, avec Benjamin Stora, 2013), Abdelwahab Meddeb pensait le monde au pluriel, et trouvait des forces vitales dans les affluents multiples qui coulaient dans ses veines.