Augmenter les impôts à Genève? Inutile, voire dangereux!
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AbonnéOPINION. L’étude sur l’attractivité de Genève présentée récemment fait écho à une série d’études fiscales réalisée par la CCIG. Celles-ci démontrent que Genève est sans conteste le canton de tous les excès

Depuis 158 ans, la Chambre de commerce, d’industrie et des services de Genève (CCIG) s’emploie à promouvoir l’économie genevoise et à défendre ses entrepreneurs. A ce titre, elle a toujours plaidé en faveur d’une fiscalité attractive qui encourage la création de valeur. En effet, plus les ressources financières sont disponibles, plus les entreprises investissent et créent de l’emploi. De même, plus un canton jouit de finances publiques saines, plus grande est sa marge de manœuvre pour piloter son avenir. Malheureusement, cette affirmation ne semble pas guider l’action publique genevoise, si l’on en juge d’après les recettes fiscales les plus élevées de Suisse par habitant et le potentiel fiscal le plus exploité. De ce point de vue, et de tous les cantons, Genève reste le plus gourmand.
Pour preuve, les recettes fiscales cumulées du canton et des communes ne cessent de croître depuis 2012. Dix ans plus tard, les comptes 2022 de l’Etat de Genève affichent des revenus fiscaux record, atteignant désormais quelque 10 milliards de francs, avec un excédent de 1,3 milliard. Alors d’où vient le problème? Non pas d’un manque de ressources, mais bien d’une crise des dépenses, doublée d’un endettement élevé.
En outre, force est de constater que, malgré la crise sanitaire, les pertes statiques de la Réforme fiscale et financement de l’AVS (RFFA), entrée en vigueur en 2020, ont été absorbées plus rapidement que prévu. Présentée par ses opposants comme un cadeau fiscal qui détruirait les services publics, la RFFA semble au contraire avoir permis d’alimenter largement les caisses de la collectivité.
Pas de baisse des recettes
On pouvait croire qu’avec la baisse d’impôts des personnes physiques votée en 2009, la situation s’améliorerait. Il n’en est rien: les recettes sont deux fois plus élevées qu’à Berne et près de trois fois plus qu’à Lucerne. Ces chiffres démontrent que les réformes ayant pour objet une baisse d’impôts produisent des effets dynamiques et ne se traduisent pas automatiquement par une baisse des recettes fiscales.
En ce qui concerne l’impôt de la fortune, la Suisse fait (presque) cavalier seul. En effet, parmi les pays de l’OCDE, seuls quelques-uns l’ont conservé. L’Allemagne, l’Autriche, le Luxembourg ou encore la France l’ont aboli au cours des deux dernières décennies. En Suisse, il n’existe qu’au niveau cantonal et communal. Et là encore, Genève fait partie des taxateurs les plus exigeants avec, en plus, l’imposition marginale la plus élevée. En outre, cet impôt pénalise l’entrepreneur et, par ricochet, l’emploi: la valorisation de l’entreprise, qui est à la fois son outil de travail et sa fortune commerciale, peut amener le patron à payer des montants égaux, voire supérieurs, à ses revenus. Pourtant, cette fortune commerciale ne constitue pas une fortune liquide, immédiatement disponible, mais bien un outil de travail générateur d’emplois.
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Le 18 juin prochain, les Genevois seront amenés à se prononcer sur l’initiative 185, qui propose d’une part d’augmenter de 50% l’impôt sur les fortunes de plus de 3 millions de francs durant dix ans, et d’autre part, de modifier de manière pérenne le calcul du bouclier fiscal. L’effet? De nombreux contribuables, dont une partie sont des entrepreneurs, ne pourront plus bénéficier de cette protection contre le caractère confiscatoire de l’impôt. Si elle était acceptée, cette initiative pénaliserait donc les entrepreneurs et affaiblirait des PME qui, à Genève comme dans le reste du pays, génèrent l’essentiel des emplois et s’acquittent d’impôts élevés.
Au vu des ressources abondantes du canton, toute hausse d’impôts est inutile. Cette initiative est même dangereuse pour l’économie, pour les PME et pour de nombreux entrepreneurs. Voilà pourquoi il convient de la rejeter avec vigueur le 18 juin prochain.
Au seuil de la nouvelle législature, gageons que l’orientation du Conseil d’Etat permettra enfin de soigner l’attractivité de Genève.
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