Pour sauver la planète, autant commencer chez soi. Sur la Toile, la devise est reine. En matière de gaspillage alimentaire, le hashtag #CaSuffitLeGachis regroupe les trucs et astuces pour revisiter les restes et sauver les fonds de frigos. Une goutte d’eau dans l’océan? Plus depuis l’avènement des réseaux sociaux, où les causes diverses et variées trouvent une caisse de résonance inédite. Sur Twitter ou Instagram, le sentiment d’appartenir à une communauté génère un engouement sans limites. Pour le crossfit et le régime sans gluten, mais aussi pour la mouvance écolo.

Et le phénomène est étudié à grande échelle. A Genève, le premier Foodhack passera bientôt le gaspillage alimentaire au crible du Big data. Les 29 et 30 octobre prochains, développeurs, Web designers, graphistes et entrepreneurs tenteront de développer des propositions innovantes pour une alimentation durable en Suisse, où 2,3 millions de tonnes de nourriture sont jetées chaque année. Soit 300 kilos par habitants.

Conscience collective

Pourquoi la Toile est-elle devenue lieu d’élaboration d’une conscience collective? Peut-être parce qu’elle encourage l’effet domino et décuple la visibilité de chaque effort, aussi modeste soit-il. Mais aussi et surtout, parce qu’à l’heure de la surexposition de soi, faire état de ses bonnes habitudes écologiques est devenu un marqueur social important. «Refuse, Reduce, Reuse, Recycle»: le mantra de la Française Bea Johnson, fer de lance de la tendance zéro déchets, fait partie intégrante du mode de vie sain 2.0.

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Désormais convaincus que la transition écologique se joue dans les frigos, les internautes y vont de leurs petits conseils. «Fruits trop mûrs? Hop au mixeur pour en faire une confiture/compote crues à mettre dans des gourdes réutilisables #CaSuffitLeGachis», propose @OumNoussayba. «Avec la carcasse d’un poulet on prépare un bouillon. Avec la chair qui se détachera plus facilement, des croquettes», ajoute @_rafiskis_.

Rien ne se perd tout se transforme: la rengaine du philosophe Anaxagore trouve une nouvelle jeunesse sur Twitter. Outre le traditionnel pain perdu, d’autres recettes de grand-mère réapparaissent sur la Toile: chips d’épluchures de pommes (sucre, cannelle, four!), soupes pêle-mêle ou encore tartes fourre-tout.

Du supermarché au restaurant

Après des décennies de surconsommation, la prise de conscience émerge au compte-gouttes. «Il faut redonner de la valeur à la nourriture que nous consommons, estime un internaute. Ainsi le gaspillage diminuera.» Et le changement débute au supermarché. Pour éviter les tentations, @San_Ru06 préconise de «ne pas prendre de caddie, mais deux sacs à remplir avec l’essentiel». «Je fais mes courses alimentaires plusieurs fois par semaine en fonction des besoins, du coup je ne jette rien», témoigne encore @AnneCrisss.

Notons aussi le regain d’intérêt pour les «gueules cassées», ces légumes biscornus ou sous-dimensionnés dont la saveur reste intacte. Puis dans le réfrigérateur, où @Scot_Serdaigle incite à «mettre les produits à date de péremption courte devant, les autres au fond». Et même au restaurant: à défaut de finir son assiette, «osez-le #doggybag, faites la chasse au #gaspillagealimentaire», lance encore @KarineLhemon.

«L’homme poubelle»

Et les initiatives chocs en faveur de l’environnement se multiplient. En septembre dernier, l’Américain Rob Greenfield se transformait en «homme poubelle» pour dénoncer la consommation vertigineuse d’emballages et autres sacs plastique. Plutôt que de jeter ses déchets, il les avait empilés sur lui un mois durant, équipé d’une tenue en plastique aux multiples poches, avant de diffuser ses vidéos sur YouTube.

Alors que les magasins en vrac essaiment et que les blogs vantent le retour du «fait maison», en matière de produits ménagers par exemple, gageons que ces démonstrations ne sont pas qu’une mode, mais bien le signe d’un changement de société.

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