«Je vous adore, mais… vous êtes qui déjà?!»
Charivari
AbonnéLa mémoire, cette traîtresse. Incollable dans ses jeunes années, notre chroniqueuse est devenue une passoire sur le tard. L’Inserm donne des clés pour remédier aux trous qui frustrent et flinguent

D’abord, il n’y a pas deux mémoires, comme on le dit souvent en pensant à la mémoire visuelle et à la mémoire auditive, mais cinq. Ainsi, quand vous ne reconnaissez toujours pas cette chargée de com qui s’est déjà présentée trois fois avec le plus charmant des sourires, ne dites pas que vous n’avez pas la mémoire des visages, c’est du flan. La mémoire sensorielle, qui comprend tous les sens et pas seulement la vue, n’est que la cinquième roue du char mnésique.
Noël, c’est le 25 décembre
Avant, renseigne un article très riche de l’Inserm – l’Institut national français de la santé et de la recherche médicale –, nous avons dans l’ordre: la mémoire de travail à court terme, au cœur du réseau et qui vous permet de vous souvenir d’acheter du pain en rentrant du boulot; la mémoire sémantique et la mémoire épisodique, deux systèmes de représentations conscientes à long terme qui ont fixé à jamais la date du 25 décembre comme celle de Noël; la mémoire procédurale qui permet des automatismes inconscients comme conduire ou marcher. Et, seulement en queue de peloton, «la mémoire perceptive liée aux différentes modalités sensorielles», immortalisée par la madeleine de Proust.
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La coquine est notre mémoire épisodique. C’est donc une mémoire à long terme, comme la mémoire sémantique. Mais contrairement à cette dernière qui nous permet de nous rappeler que Napoléon n’est pas un joueur de foot et qu’il n’a pas été exilé en Arabie saoudite, mais à Sainte-Hélène, la mémoire épisodique est personnelle. Elle fixe notre roman de vie, nos moments marquants. Enfin, plus ou moins marquants, vu son efficacité. Elle se constitue entre 3 et 5 ans. Voilà pourquoi les gens qui disent se rappeler parfaitement avoir reçu un éléphant rose à 2 ans ont en fait reconstruit ce souvenir d’après photos ou récit.
Napoléon et le foot
Alors, que faire quand tout fout le camp? Ce n’est pas simple, car il n’existe pas un centre de la mémoire dans le cerveau, mais plusieurs. L’hippocampe et le lobe frontal sont particulièrement impliqués dans la mémoire épisodique (l’éléphant rose) quand les régions corticales se chargent de la mémoire perceptive (la madeleine). La mémoire sémantique (Napoléon) se royaume dans l’ensemble du cerveau alors que la procédurale (conduire) sollicite surtout le cervelet.
Ces infos sont intéressantes pour les professionnels. Pour nous, elles permettent juste de briller en société. Par contre, bien dormir, bien manger, bien bouger, lire et s’intéresser aident à maintenir une bonne «plasticité des synapses». Par ailleurs, ne pas craindre de se répéter l’info, trois fois au minimum, car plus on vieillit, plus l’encodage est volatil.
Gare aux oubliettes!
Donc, à partir de 50 ans, quand vous regardez quelqu’un, vous le regardez vraiment, intensément, genre tableau dans un musée. Et quand vous écoutez une anecdote, n’hésitez pas à prendre des notes. Ce n’est pas glamour, glamour, pour l’effet bulles de champagne, on repassera, mais c’est la seule manière de ne pas être relégué au ban de la société. Ou aux oubliettes.
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