Révolution de palais
Petite promenade au cœur du théâtre bernois avant l’élection de mercredi. Mission: il faut retrouver Charlie. Mais Charlie n’est nulle part…

On s’amuse bien, ces jours-ci à Berne. On joue à «Où est Charlie?». Quand on était petit, on devait retrouver Charlie dans une image. Quelques années plus tard, on joue toujours… mais on cherche Christoph au Palais fédéral. D’après Wikipédia, «la difficulté du jeu vient du fait que les endroits où se trouve Charlie sont remplis de personnages divers». Exact. 246, pour être précis. L’encyclopédie en ligne précise: «Il y a également des personnages déguisés comme Charlie, ce qui augmente la difficulté.» Idem à Berne. Paysan ou dandy. Avec ou sans catogan. Mais à Berne, c’est plus compliqué, il y a un piège: Charlie n’est nulle part. Christoph n’est pas là.
Il n’est plus là, mais il est partout. Par procuration: son poulain est là, sa fille est là, son rédacteur en chef est là. Sa fille, d’abord: amusant paradoxe, le chef du parti le plus macho de Suisse envoie une femme pour la relève familiale. En première semaine, son activité principale consista à mâcher un chewing-gum avec une élégance relevant plus d’une étable que d’un parlement.
Il y a ensuite le poulain, le futur conseiller fédéral. Aeschi est partout. Comme Charlie. A 7 heures en interview, à midi à la tribune, à 15 heures en audition. Et à minuit au bar du Bellevue. Il s’arrête à notre table, une bière à la main. Je lui demande s’il est réellement, comme on le dit, une marionnette de Blocher: «Un fantasme médiatique», rigole-t-il. Il a l’air sincère, je le crois. Et le futur conseiller fédéral va boire un verre, une table plus loin, avec une élue… socialiste. Au Bellevue Palace. Tout fout le camp.
Enfin, il y a le rédacteur en chef de Christoph. Le patron de la Weltwoche, Köppel. On le croise un jour au bar du parlement, à l’apéro de midi. Les Romands boivent une bière, fidèles au portrait que son journal avait dressé des Welsches, les «Grecs» de la Suisse. On l’invite à se joindre à nous. Après s’être excusé de nous avoir qualifiés de Grecs («alors que les «vrais» Grecs sont les Bernois», précise-t-il), il accepte notre invitation, et commande… un thé noir. «Avec du lait chaud.» Entre deux gorgées de bière, on lui demande pourquoi il traite tous les Romands d’alcooliques. Il s’excuse (encore) d’avoir une rédaction «anarchique», incontrôlable. D’ailleurs depuis qu’il est à Berne, il a avancé les séances de rédaction à 6 heures du matin. Pas un horaire de Grec, ça. Il veut être partout, lui aussi. Comme Aeschi et Charlie. Mais au fait… où est Christoph?
On s’amuse bien, ces jours-ci à Berne…
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