A quoi peut bien servir un prix fédéral de musique? A saluer une carrière exemplaire? A mettre en lumière un artiste, une musicienne ou un groupe qui œuvrent dans l’ombre? A permettre à des créateurs de développer un nouveau projet grâce à sa dotation financière? Ou plus prosaïquement à servir d’alibi culturel au Département fédéral de l’intérieur? Ça ne vous étonnera pas d’apprendre que pour moi, c’est un peu tout cela à la fois.

Mais avant tout, j’applaudis: créé en 2014, le Prix suisse de musique, puisque c’est son appellation officielle, au singulier même si les lauréats sont annuellement au nombre de 15, m’aura permis de parfaire ma culture musicale et de me dire que Le Temps, dans le cadre des causes journalistiques mises en avant l’an dernier à l’occasion de ses 20 ans, avait bien fait de défendre la créativité suisse. En matière de musiques, au pluriel puisque les récipiendaires de cette récompense œuvrent dans absolument tous les genres, du plus populaire au plus élitiste, la petite Confédération helvétique est décidément un grand pays.

A consulter:  notre dossier «créativité suisse»

C’est ce vendredi qu’a été remis, à Bâle, le Prix suisse de musique 2019. Parmi les récipiendaires, de nombreux Romands: le percutionniste jazz Pierre Favre, le DJ hip-hop Sebb Bash, la rappeuse KT Gorique, la batteuse tout-terrain Béatrice Graf, le compositeur contemporain Michael Jarrell, la productrice électro Bonaventure et l’expérimentateur électroacoustique d’incise. Visionner les capsules vidéo réalisées pour l’occasion est essentiel. Car comme vous probablement, je ne connaissais pas tout ce beau monde.

Architectes sonores

De même, si j’avais vaguement entendu parler de Cod.Act, je ne connaissais pas véritablement le travail des Loclois André et Michel Décosterd, sortes de professeurs Tournesol – les cheveux en moins – de la musique expérimentale. Habitué aux marges, Cod.Act est aujourd’hui officiellement adoubé puisqu’il a reçu le Grand Prix suisse de musique – un des 15 lauréats est chaque année placé au firmament de la musique, les Neuchâtelois succédant ainsi à Franz Treichler, Heinz Holliger, Sophie Hunger, Patricia Kopatchinskaja et Irène Schweizer.

C’est quoi Cod.Act, me suis-je d’abord demandé? Eh bien Cod.Act, c’est un duo d’architectes sonores créant des machines improbables. Les Décosterd mènent une quête harmonique qui les voit fusionner mouvement et son à travers des installations et œuvres d’art créées par Michel le plasticien et interprétant des pièces composées par André le musicien. Tout cela vous paraît un brin cérébral? Plongez-vous dans l’œuvre de ces frangins, et vous verrez que c’est au contraire organique.


Les dernières chroniques (in)culture

Le Temps publie des chroniques et des tribunes – ces dernières sont proposées à des personnalités ou sollicitées par elles. Qu’elles soient écrites par des membres de sa rédaction s’exprimant en leur nom propre ou par des personnes extérieures, ces opinions reflètent le point de vue de leurs autrices et auteurs. Elles ne représentent nullement la position du titre.