Ressources humaines
CHRONIQUE. De plus en plus de collaborateurs et de collaboratrices choisissent de retourner chez un employeur quitté il y a quelques mois ou quelques années. Les accueillir de nouveau peut s’avérer un processus gagnant-gagnant, mais il s’agit de prendre certaines précautions

«Rester, partir ou revenir… Telle est la question»… Tel est également le titre de l’enquête qu’a publiée la société de conseil UKG en 2022. L’étude vise à mieux comprendre les motivations de personnes ayant démissionné pendant la pandémie et elle interroge près de 4000 personnes en France, en Allemagne, au Mexique, aux Pays-Bas, en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis. Or, selon cette étude, plus de 40% des personnes ayant démissionné considèrent qu’elles étaient mieux dans leur ancien poste et qu’elles ont pris une décision trop rapide. Ce chiffre grimpe même à 60% chez nos voisin·e·s français·e·s.
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Plusieurs études en attestent, de plus en plus de collaborateurs et de collaboratrices choisissent de retourner chez un employeur quitté il y a quelques mois ou quelques années. Ce sont les fameux employé·e·s «boomerangs». Si le phénomène reste minoritaire, il s’accélère néanmoins et touche de plus en plus de démissionnaires. L’herbe n’est pas toujours plus verte ailleurs!
Quitter n’est pas forcément trahir
Et leur ancien employeur? Serait-il prêt à les rengager? A l’heure où le marché du travail est particulièrement tendu, de plus en plus de sociétés sont enclines à ouvrir grand leur porte à leurs ancien·ne·s collaborateurs et collaboratrices. Certaines vont même plus loin, développant de réelles stratégies pour garder le lien avec leurs «alumni», à l’image des réseaux qu’entretiennent certaines universités. Cette démarche implique pour certain·e·s un changement de paradigme: quitter n’est pas forcément trahir! Choisir de vivre une autre expérience n’est pas un manque de loyauté!
Accueillir un·e employé·e «boomerang» comporte en effet de nombreux avantages! La personne connaît la culture de l’entreprise, ses codes et ses valeurs, et elle a envie de s’y inscrire, probablement dans la durée. Elle revient riche de connaissances et de compétences dont la société bénéficiera. Enfin, connaissant une partie des équipes en place, l’écosystème et le modèle économique, elle pourra s’intégrer et être opérationnelle très rapidement.
Pour que le retour soit possible, il est néanmoins important que la personne ait laissé une image positive et soit partie en bons termes. Un patron de PME me confiait récemment avoir refusé le retour d’un collaborateur dont l’attitude était particulièrement négative, le comportement presque toxique pendant de longs mois avant son départ. Sans lui fermer définitivement la porte, ce patron a invité le collaborateur en question à faire de nouvelles expériences…
Le retour d’un·e ancien·ne peut également présenter quelques risques. N’offrons pas de ponts en or massif aux personnes qui souhaitent revenir, au risque de donner le sentiment aux personnes qui font le choix de rester qu’elles sont systématiquement moins bien traitées. Partir doit s’inscrire dans une perspective de développement professionnel et pas dans une stratégie de poker visant à provoquer une rapide surenchère.
Eviter le terrain conquis
Par ailleurs, pour assurer le succès d’une réintégration, il est important que toutes les parties prenantes ne la considèrent pas comme acquise: l’entreprise a très certainement connu des évolutions et la société que la personne a quittée n’est pas exactement celle qu’elle va retrouver. Dans ce contexte, charge au management de prendre le temps d’expliquer les changements et à la personne concernée d’éviter de se comporter comme en terrain conquis. Si la personne rejoint son ancienne équipe, partager le sens de ce retour avec les membres de l’équipe représente également un facteur clé de succès.
A l’heure où la pénurie de ressources est une réalité pour nombre d’entreprises, accueillir des salarié·e·s «boomerangs» peut réellement s’inscrire dans une stratégie dont tout le monde ressort gagnant! Alors… sachons rester ouvert·e·s!
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