Les hautes écoles spécialisées, actrices de la mixité sociale
Formation
CHRONIQUE. Une enquête de l’Office fédéral de la statistique montre que la population étudiante de la HES-SO vient d’horizons très divers. Une bonne nouvelle pour la société suisse, analyse notre chroniqueuse

Permettre que ses enfants bénéficient d’une meilleure formation que soi. Combien de parents ont fait de cette phrase un objectif de vie, une motivation professionnelle, parfois au prix de sacrifices personnels? Cette volonté caractérise de nombreux desseins familiaux, mais, dans les faits, quelle est la part de l’image d’Epinal et celle de la réalité? Une enquête de l’Office fédéral de la statistique (OFS) permet de tirer quelques utiles enseignements. Et d’être plutôt optimiste, ce qui n’est pas un luxe en ces temps tourmentés.
Car oui, contrairement à une idée reçue, l’enseignement supérieur est aussi un espace d’intégration, et les hautes écoles promeuvent la mixité sociale! Le constat est réjouissant: la reproduction des élites entre elles, l’entre-soi et la fracture éducative ne sont pas des fatalités. La dernière enquête nationale de l’OFS sur la situation économique et sociale des étudiant·es montre que la HES-SO compte plus d’un quart d’étudiant·es issu·es de la migration, et près de deux tiers des effectifs estudiantins ont des parents qui n’ont pas de diplôme universitaire ou équivalent. C’est davantage que la moyenne des hautes écoles universitaires, où cette part tombe à 44%.
Un contact avec le terrain
Autre enseignement de cette enquête, la motivation à concrétiser une aspiration professionnelle vient en deuxième position, derrière l’intérêt spécifique du domaine choisi. Cette faculté des étudiant·es à se projeter dans leur propre avenir, à chercher à se réaliser à travers un devenir professionnel, conforte la mission implicite de la HES, celle d’établir ce pont essentiel entre les études tertiaires et l’ancrage pratique avec les milieux de l’économie, de la culture, du social, de la santé – ces piliers de notre société.
Lire aussi: Luciana Vaccaro, rectrice de la HES-SO: «Cette crise, c'est le monde d'aujourd'hui»
Ce qui est aussi encourageant, c’est de voir que ces tendances sont durables et stables. Tout cela va dans le sens d’une intégration par les études, qui sont un pont et pas une barrière, des portes qui s’ouvrent au lieu de se fermer, quels que soient le profil des personnes concernées, leur extraction sociale, leur âge, leurs origines… Le principe même des HES, que nous appliquons en Suisse romande avec rigueur et enthousiasme, à très large échelle, c’est de compléter l’acquisition des connaissances théoriques par un contact permanent avec le terrain – qu’il soit artistique, entrepreneurial, technique ou social.
Bourses et formations en emploi
Cette intégration comprend aussi un autre aspect qui peut avoir une influence significative sur le cours de la formation. Les statistiques le montrent: une part non négligeable de nos étudiant·es travaillent à côté de leurs études, souvent par nécessité. Si le système de bourses est encore largement perfectible, les offres proposées permettent de soulager en partie celles et ceux pour qui cette réalité est handicapante. A la HES-SO, 13% des étudiant·es ont fait appel à une bourse, ce qui est très légèrement supérieur à la moyenne suisse (11%). Mais nous avons aussi aménagé nos possibilités de formation en emploi et de coordination des formations avec une réalité professionnelle pour que de cette contrainte naisse une opportunité, celle de vivre dans le monde des métiers tout en poursuivant ses études et d’enrichir ainsi son parcours personnel.
En conclusion, l’intégration par les études en haute école a un effet positif non seulement sur les étudiant·es et leurs familles, mais aussi sur l’ensemble de la société. Elle permet d’instaurer un système basé sur le mérite et les qualités individuelles, le meilleur garant de l’excellence dans le monde du travail. Elle permet aussi de maintenir une certaine paix sociale en assurant l’égalité des chances. Un pays qui est capable de maintenir une offre en formation compétitive, pertinente et abordable financièrement investit dans son avenir. Et donne comme signal que l’ascenseur social demeure grand ouvert à toutes et tous.
La dernière chronique de Luciana Vaccaro: Opposer les formations, c’est nier les atouts du système suisse
Le Temps publie des chroniques et des tribunes – ces dernières sont proposées à des personnalités ou sollicitées par elles. Qu’elles soient écrites par des membres de sa rédaction s’exprimant en leur nom propre ou par des personnes extérieures, ces opinions reflètent le point de vue de leurs autrices et auteurs. Elles ne représentent nullement la position du titre.