Quand les statistiques révèlent un #Kidstoo, le Conseil fédéral répond #Nomoney
Conférence de conciliation
OPINION. Malheureusement, les chiffres laissent envisager une évolution défavorable de la maltraitance des enfants. L’occasion d’en faire une vraie cause prioritaire? Pas en Suisse, où l’on préfère couper la poire en 26

L’actualité regorge de statistiques, pourcentages, comparaisons. Chaque jour une nouvelle probabilité, le résultat d’une nouvelle enquête. Quant à moi, il y a une étude en particulier dont la lecture me glace le sang, année après année. Réalisée par les services pédiatriques hospitaliers suisses, elle s’intéresse à la maltraitance des enfants. Les faits qu’elle révèle sont alarmants: 10 à 20% des mineurs sont victimes d’une forme ou une autre de maltraitance (physique, psychique, abus sexuels, négligence). Dans 80% des cas, l’auteur se trouve dans le cercle étroit de la famille.
Les témoignages révélés grâce au mot-clé #Metoo ont contribué à faire apparaître au grand jour des comportements, des contraintes, des humiliations qui étaient jusqu’ici tues. Hélas, les chiffres font apparaître un triste #Kidstoo qui n’a pas encore connu le même retentissement.
Les experts pour une meilleure coordination
Et de toute évidence, nous n’aurons pas de très bonnes nouvelles concernant l’année 2017. La semaine dernière, une publication des hôpitaux zurichois attestait en effet une hausse de 12% des cas de maltraitance traités. Hasard du calendrier, le Conseil fédéral publiait simultanément un rapport sur la détection précoce des violences intrafamiliales, fondé sur les constats d’experts. Ces derniers préconisent la mise en place d’une procédure systématique d’alerte et de signalement, et le développement d’une véritable coordination fédérale.
Une chape de silence
Sans le sou, dit-il, le Conseil fédéral décline poliment en rappelant que le domaine relève de la responsabilité des cantons et des communes. On sait pourtant à quel point les conséquences de la maltraitance infantile peuvent être dévastatrices pour la santé́ des victimes. Et le silence qui règne souvent autour de ces agissements alourdit encore leur souffrance, qu’elles porteront jusque dans leur vie d’adulte. Des souffrances qui généreront des dépenses, puisqu’on en est à argumenter de la sorte.
Nos voisins français, dont il est de bon ton de dénoncer le centralisme excessif, ont su faire des violences domestiques (auxquelles appartiennent les violences contre les enfants) une véritable cause nationale. Que fait la Suisse? Tout en exprimant sa préoccupation, elle se hâte de décréter… 26 causes cantonales, meilleure façon d’éviter une prise de conscience et une responsabilisation réelle. Sorry, kids.
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