Révolution de palais
Trop forts, nos populistes. À côté d’eux, Trump est un boy-scout!

Il y a de l’eau dans le gaz, dans le couple politico-médiatique. La cohabitation est compliquée, ces temps. Quand on parle d’immigration de masse, les journalistes deviennent massivement envahissants. Mercredi, ils étaient partout. Comme à la maison. Ou, pour être précis, comme sur un plateau de télévision. Un journaliste nous a ordonné de nous taire: il était en direct, et on faisait trop de bruit pour lui. Un collègue l’a remis à sa place: «Tais-toi toi-même!». Mais à part ça, on s’aime.
Hasard du calendrier, plus tôt dans la journée, on débattait de lois pour museler la SSR. Il y a quelque chose qui cloche. Les médias privés licencient à tours de bras, les populistes veulent tailler dans le service public, et des journalistes engueulent des élus dans les couloirs. Tout va bien.
Tout le monde était tendu
Il faut dire que tout le monde était un peu tendu, la semaine dernière. La faute à l’immigration de masse. Dans la salle du Conseil, des élus écumants ont massivement envahi la tribune, pour déverser leur haine du système politique suisse. C’était drôle de les voir aussi bruyants: ces trois dernières années, j’ai participé à des dizaines de réunions entre patrons et élus, à huis clos, pour trouver des solutions au vote du 9 février 2014. Des réunions de gens que la gauche qualifierait «de droite». Les populistes étaient donc aussi là. Et pendant ces trois ans, je ne les ai jamais entendus. Pas une fois. Silencieux, au fond de la salle, un peu gênés d’entendre des patrons les engueuler, et leur demander d’éteindre l’incendie qu’ils avaient déclenché. Comme des gamins pris en faute.
La revanche médiatique
Mercredi, donc, c’était l’heure de la revanche médiatique. Des heures de séance à se faire taper sur les doigts en silence, ça donne des envies d’une courageuse révolte publique. Ils se sont lâchés. C’était à qui parle le plus fort, en martelant un message en boucle: vous êtes tous des gros nuls, et d’ailleurs, votre projet de loi est nul. «Nous n’avons rien sur la table, aboya leur chef de groupe. Et on ne fait pas un référendum contre rien». En résumé: le parlement ne fait rien, et ne sert à rien. Donc, on ne fait rien non plus. On aboie.
Martullo martèle, les médias applaudissent. Le message fut repris en chœur par les éditorialistes, convaincus par les populistes médiaphobes. Moralité: en «martullant», vous séduisez des médias que vous détestez, et qui vous détestent. Trop forts, nos populistes. À côté d’eux, Trump est un boy-scout.
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