Toutes et tous égaux face à l’épidémie
Conférence de conciliation
OPINION. La session parlementaire commence et, avec elle, son bal de déplacements vers la capitale. Un rassemblement passé entre les gouttes de la sentence du Conseil fédéral et peut-être une nouvelle chaîne de contagion en perspective

Où sont nos masques? En rupture de stock, a-t-on lu. Pourtant, dans la rue, je n’ai encore croisé personne affublé de son bouclier antiviral – qui n’est du reste pas d’une grande aide contre le coronavirus, a-t-on également lu. J’imagine l’objet convoité fièrement installé sur l’étagère d’une salle de bains. Au cas où. Car on ne sait plus sur quel pied danser; un jour serein, l’autre panique.
Le Conseil fédéral s’arroge momentanément les pleins pouvoirs épidémiques pour faire face à une situation «particulière», tout en nous livrant un message de paix. «Il faut simplement agir avec calme et détermination», nous prescrit notre conseiller fédéral Berset. Respirer, donc, mais pas trop près les uns des autres. Pour s’orienter, on s’accroche à l’actualité, en continu. Nombre de cas, nombre de décès, population à risque, commencer par le bout des doigts lorsqu’on se lave les mains; pas de quoi trembler.
Adieu visiteurs et lobbyistes
Alors on réunit notre détermination, puisque Berne nous appelle à la discipline. La délégation administrative du parlement aussi, d’ailleurs: la session qui débute sera intime. Adieu visiteurs, lobbyistes ou journalistes non accrédités qui constituent en temps normal le troupeau de plus de mille têtes transhumant vers le Palais fédéral. Entre parlementaires, on se sourira d’un air gêné, nous à qui la poignée de main a été fortement déconseillée. Au Conseil des Etats, on renoncera à la ronde des escargots du dernier jour, fameux rituel de mains serrées. Question de responsabilité individuelle.
Mais est-ce suffisant? L’Office fédéral de la santé publique ajoute que la distance à maintenir est d’au moins 1 mètre et que le mélange de générations doit à tout prix être évité. Regardons les choses en face: le parlement est un nid de contagion. Venus de tous les coins du pays, jeunes et surtout moins jeunes, nous sommes des centaines à nous retrouver dans l’exiguïté bernoise. Ainsi, quand on sortira de ces trois semaines – si on en sort –, on gardera cette expérience: accorder la primauté à la santé, se mettre en retrait pour préserver la collectivité, trouver des solutions aux problématiques planétaires et s’y tenir localement. De la solidarité à grande échelle. Tout compte fait, ce n’est pas une mauvaise chose que cette session ait lieu, si ce virus-là contamine notre parlement.
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