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Le coronavirus et les inutiles subventions aux éoliennes

OPINION. L’implantation en Suisse d'éoliennes industrielles importées devrait être abandonnée, ou mise en veilleuse via un moratoire de dix ans ou plus, avance Jean-Marc Chapallaz, ingénieur EPFL, à Baulmes, dans le canton de Vaud

Des éoliennes au parc de Mont-Crosin, 3 août 2016. — © Keystone
Des éoliennes au parc de Mont-Crosin, 3 août 2016. — © Keystone

La Suisse lutte contre le coronavirus en demandant beaucoup de sacrifices à sa population et à son économie. Les économistes annoncent une récession en 2020, ce qui va poser des problèmes sérieux à nos entreprises, avec de nombreuses pertes d’emplois.

Dans ce contexte, la demande de Suisse Eole de privilégier l’énergie éolienne en Suisse à travers une modification de la loi sur l’énergie en exigeant un statut «prioritaire» de l’éolien sous prétexte que les éoliennes produisent plus en hiver qu’en été tombe fort mal à propos.

La production d’électricité éolienne est très coûteuse en Suisse, les vents sont en effet plus faibles que chez des pays voisins, comme l’Allemagne ou le Danemark.

Besoin de subventions

L’électricité éolienne en Suisse a besoin de subventions importantes pour être viable. Le kWh éolien est actuellement rétribué, grâce aux subventions RPC payées par les Suisses, à hauteur de 20 cts/kWh, soit entre 4 et 5 fois le prix du marché. Cette électricité achetée par le gestionnaire du réseau Swissgrid est revendue à bas prix.

S’il est vrai que l’éolien produit davantage en hiver qu’en été, ce n’est pas seulement le cas en Suisse, mais dans toute l’Europe. Les grands vents ou les tempêtes conduisent à une surproduction d’électricité sur tout le continent, avec une chute des prix, voire une apparition de prix négatifs: on paie les consommateurs pour qu’ils consomment une électricité produite en surabondance qui menace la stabilité du réseau électrique européen, avec risque de black-out.

Les entreprises électriques suisses constatent ce phénomène: même en hiver, l’électricité éolienne n’a que peu de valeur sur le marché en cas de forts vents.

Exiger des subventions pour soutenir l’éolien sous prétexte que sa production est importante pour la survie énergétique de la Suisse en hiver démontre une ignorance du fonctionnement du marché de l’électricité européen auquel la Suisse est intégrée.

La population suisse finance, via sa facture d’électricité, les éoliennes à hauteur de 15 cts/kWh ou davantage, la subvention représentant la différence entre la rétribution RPC (20 cts/kWh) et le prix du marché (5 cts/kWh ou moins, voire un montant négatif selon les circonstances).

Quel lien avec le coronavirus? La réponse est liée aux conséquences économiques de cette pandémie.

Les éoliennes subventionnées par les consommateurs suisses sont entièrement achetées à l’étranger, depuis leur fabrication, leur montage y compris leur maintenance et la télégestion. Elles créent peu d’emplois qualifiés en Suisse et peu d’innovation, les principales contributions nationales étant la construction de socles en béton, des accès et des raccordements au réseau électrique.

De très nombreux citoyens de ce pays s’inquiètent à juste titre des conséquences négatives des éoliennes sur notre nature et nos paysages, les impacts sur la biodiversité, le bien-être et la santé des riverains, la valeur de l’immobilier, le tourisme et les emplois qui l’accompagnent. L’opposition aux éoliennes grandit via de nombreuses associations citoyennes.

Les éoliennes sont des machines gigantesques qui produisent toutefois peu d’énergie en comparaison avec d’autres sources: pour compenser la production de la petite centrale nucléaire de Mühleberg (5% de la consommation d’électricité du pays), il faudrait compter 800 éoliennes réparties environ pour moitié sur les crêtes du Jura et le reste sur le Plateau et les Alpes.

Le coût en subventions serait d’environ 500 millions de francs par an, ce qui équivaut à 5000 emplois qualifiés.

Les habitants de ce pays sont peu informés de la transformation de leurs beaux paysages que cela aura pour conséquence. Il n’existe pas actuellement de photos ou de vidéo montages montrant toutes ces éoliennes.

Subventionner des éoliennes importées n’apporte au pays ni avantages économiques, ni progrès environnemental, ni un mieux vivre pour la population.

Mettre l’éolien en veilleuse?

Il serait préférable de consacrer ces subventions au soutien des technologies énergétiques développées par des Suisses, créatrices d’emplois en Suisse, avec en priorité la maintenance et la modernisation de nos barrages, et le photovoltaïque, qui produit une électricité deux fois moins chère que l’électricité éolienne et qui est bien accepté par la population.

La crise du coronavirus, avec ses conséquences économiques inquiétantes va nous obliger à revoir nos priorités et à recentrer les ressources financières du pays sur des secteurs indispensables à notre survie et au maintien d’emplois et de PME innovantes en Suisse.

Il est logique que la stratégie énergétique soit adaptée à ces circonstances et redéfinisse ses priorités, et que l’éolien importé avec force subventions, peu productif et coûteux, soit abandonné, ou mis en veilleuse via un moratoire de dix ans ou plus.