Débusquer un livre rare, une puissante addiction
OPINION. Le neurologue Julien Bogousslavsky a payé cher sa passion de bibliophile. Après un procès retentissant et un court séjour en prison, il revient sur les élans et les dangers du collectionneur
Après une première semaine de débats consacrés à la justice internationale, cette semaine nous revenons sur les addictions, thématique coordonnée par la journaliste invitée Malka Gouzer.
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Pour la plupart des gens, le terme d’addiction a une coloration négative. Certes, en indiquant une dépendance, il nie un espace de liberté… Mais n’est-on pas tous «addicts» à l’oxygène? On dira qu’il nous est nécessaire, mais n’est-ce pas vrai pour précisément toutes les addictions quand elles sont liées à une passion, c’est-à-dire à une nécessité intérieure? La passion pour un être ou une activité ne rend-elle pas la vie inconcevable sans eux?
Chez le collectionneur, ce feu qui charrie jeu et risque, donc parfois danger, correspond je pense au désir de se confronter à l’objet du désir. Mais l’aspect particulier est qu’en tant que miroir du collectionneur, la collection force celui-ci à se confronter à lui-même. Et notamment à ce qu’une collection implique pour lui de connaissances, de temps et de moyens, cette fameuse triade qui définit la capacité à collectionner en tant qu’activité «créatrice» («sa» collection). Ici, l’argent est certainement le facteur limitant le plus difficile à gérer pour le collectionneur passionné quand il «doit» acquérir l’objet après lequel il court depuis des années… Pour combler ce «manque».