Mais qu’ont donc fait nos conseillers d’Etat pour qu’on les traite soudainement si mal? On ne leur passe plus rien, ni les vacances lointaines payées par des princes étrangers, ni les tournées privées réglées avec la carte de crédit de fonction. Et les voilà menacés de perdre leur rente à vie, celle qu’ils touchent dès que leur mandat prend fin, qu’il s’agisse d’un départ volontaire, d’une non-réélection ou de pépins de santé. Acharnement, vague de puritanisme déferlant sur la politique?

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Plus simplement, la rente à vie des ministres cantonaux apparaît toujours plus comme un inéquitable anachronisme aux yeux des législateurs et des citoyens-contribuables. A l’origine, ces rentes devaient assurer aux membres des exécutifs une retraite et certaines garanties d’indépendance dans l’exercice de leur pouvoir.

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Aujourd’hui? Les carrières politiques, commençant plus tôt et se faisant plus courtes, s’achèvent parfois à 50 ans à peine, voire moins. La rente viagère, qui représente en général une bonne moitié du salaire (soit 125 000 francs par an dans le cas vaudois), apparaît surtout comme un privilège séparant les élus du commun des mortels. On peut en dire autant pour les conseillers fédéraux, qui en bénéficient également.

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A l’heure où les Suisses sont confrontés à des révisions douloureuses des acquis sociaux en matière de retraite, les avantages accordés à des hommes et des femmes dans la force de l’âge ne passent plus. Et ils deviennent chers: Genève dépense plus de 3 millions de francs par an pour la rente de ses anciens conseillers. C’est notamment pour des raisons financières que les cantons qui ont supprimé ce système ont agi.

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Huit cantons connaissent encore la rente à vie, dont cinq latins. Fribourg est sur le point d’y renoncer, le gouvernement se déclarant ouvert à une demande déposée au Grand Conseil. Vaud et Genève, au contraire, érigent la région lémanique en dernier bastion de la rente à vie. Ne voient-ils pas que la cause est perdue? Une initiative a été lancée à Genève par les Vert’libéraux. Il serait bon qu’il en aille de même chez les voisins vaudois.

Le changement doit être abordé sans crispation. Car il s’agit d’abolir un apanage dépassé, non de faire des anciens magistrats des gens plus à plaindre que leurs administrés. L’attractivité de la fonction publique mérite d’être défendue à son plus haut niveau. L’augmentation des salaires, des indemnités de départ et des stratégies de reconversion impliquant les partis offrent des solutions.