Hyperlien
La presse a toujours publié des lettres de lectrices et de lecteurs. Un archaïsme, à l’heure des réseaux sociaux? Plutôt une fenêtre de partage, le signe qu’on se sent inclus dans les débats d’intérêt public

«Madame, Monsieur,
Vous trouverez en annexe pour publication un texte spécialement affûté pour la sortie imminente du référendum attendu ad hoc. Mon propos me paraît marquant par son positionnement laïc, son centrisme politique, sa force et son respect. Heureux de vous le proposer en exclusivité, je me réserverais cependant l’alternative de l’envoyer à (un autre titre) si je ne le voyais pas dans vos colonnes jusqu’au vendredi 23 avril (cette date parce que je serai absent par la suite).»
On peut hésiter, ce message est-il plus présomptueux ou est-il plus sincère? Il témoigne en tout cas d’une solide volonté de participer au débat public, ce qui est le cas de la plupart des lettres que nous recevons de notre audience – parfois ces lettres sont d’ailleurs qualifiées d’«articles», signe de l’importance symbolique qu’elles ont pour leurs rédactrices et rédacteurs. Rien à voir avec un commentaire posté sur un réseau social, où les voix se perdent: écrire à un média c’est porter sa parole plus haut, prendre le temps d’expliquer une prise de position, réaffirmer sa place dans le concert démocratique. Le courrier des lecteurs, aussi ancien que la presse, garde de solides atouts! Il est aussi plus accessible à notre lectorat plus âgé.
Nous expérimentons depuis quelques semaines un nouveau système de publication de ces messages. Un rendez-vous régulier est maintenu dans nos éditions papier le lundi, dans le cadre de la page Hyperlien devenue hebdomadaire; le reste de la semaine, d’autres lettres sont publiées dans les pages Avis du journal, dans la rubrique «De vous à nous», selon l’espace disponible – un espace qui varie tous les jours. Enfin sur le web, nous publions tous les mercredis une sélection de ces courriers.
Lire notre dernière sélection sur le web: Vous nous avez écrit sur… l’agriculture, le gâchis du Grand Théâtre à Genève, et la numérisation de la société
Pas d’élucubrations
Comment les choisissons-nous? Ils doivent être en rapport avec une thématique d’actualité d’intérêt général, et lui apporter un éclairage original ou personnel, des nuances étayées par une expérience vécue ou une compétence particulière. Pas d’élucubrations, mais ce peut être un témoignage, un commentaire d’un événement politique national ou international, une lettre ouverte, ou une question sur notre ligne éditoriale: il n’y a pas de sujet interdit ou tabou, seules les attaques ad hominem sont proscrites, ainsi bien sûr que les propos sexistes, racistes ou qui tombent sous le coup de la loi. Mais il n’y a pas de droit à la publication, Le Temps se réserve le choix des lettres qu’il publie, c’est aussi une certaine image de nous-mêmes qui se reflète dans les propos des personnes qui nous écrivent.
Certaines signatures reviennent souvent, venant d’habitués qui écrivent régulièrement, voire qui partagent généreusement leur prose entre Le Temps et d’autres titres. D’autres messages sont des essais isolés, urgents, des coups de gueule ou coups de chapeau – plus rarement: on écrit bien davantage pour s’emporter et dénoncer que pour encourager et féliciter… Tous ne seront pas élus mais tous sont lus, triés, pesés. Si une lettre n’est pas publiée c’est aussi parfois tout simplement parce que d’autres précédentes ont défendu le même point de vue: nous privilégions la variété des opinions quand elle est possible.
Il peut nous arriver, rarement, de retoucher légèrement un message, pour resserrer son propos, pour le rendre plus nerveux et incisif (la longueur idéale est d’environ 2000 signes). Mais jamais, bien sûr, nous ne touchons à son sens ou à son ton.
Et vous, qu’est-ce qui vous fait réagir?
Le Temps publie des chroniques et des tribunes – ces dernières sont proposées à des personnalités ou sollicitées par elles. Qu’elles soient écrites par des membres de sa rédaction s’exprimant en leur nom propre ou par des personnes extérieures, ces opinions reflètent le point de vue de leurs autrices et auteurs. Elles ne représentent nullement la position du titre.