Il y a de quoi applaudir. Les Etats-Unis ont reconnu mercredi soir l’urgence de la situation sanitaire qu’impose le Covid-19 à toute la planète. Ils admettent désormais le principe de dérogation aux règles liées à la protection de la propriété intellectuelle. Dans les mots du président américain, Joe Biden, personne ne sera à l’abri du virus aussi longtemps que tout le monde ne sera pas vacciné. La décision américaine est historique. Notamment parce que les intérêts financiers de l’industrie pharmaceutique américaine sont immenses.

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Depuis son apparition fin 2019 en Chine, le Covid-19 a infecté 160 millions de personnes et provoqué 3,2 millions de décès. L’industrie pharmaceutique, aidée massivement par les Etats, a développé des vaccins en moins d’une année. Du jamais-vu. La plus grande campagne de vaccination de l’histoire se déploie. En apparence, tout va bien. Dans les faits, une personne sur quatre dans les pays développés a été vaccinée à ce jour alors que, dans les pays à bas revenu, c’est une sur 500. L’inégalité saute aux yeux. L’industrie promet 2 milliards de doses sur l’année mais, à ce rythme-là, il faudra entre deux et trois ans pour atteindre l’immunité collective.


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La décision américaine pourrait permettre à des usines dans le monde entier de fabriquer les précieux sérums. Mais ce n’est toutefois pas demain que le Bénin, la Bolivie ou le Cambodge auront des doses à gogo. L’Organisation mondiale du commerce, gardienne de l’Accord de 1995 sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, doit encore approuver la demande de dérogation aux brevets. Le oui n’est pas encore acquis.

On ne parle pas d’expropriation

Le Maroc, l’Egypte, l’Indonésie et le Pakistan ont signalé qu’ils disposaient des capacités de production. A cette liste, on peut ajouter l’Inde, qui fournit déjà près de 60% des vaccins chaque année dans le monde, l’Afrique du Sud ou encore le Brésil, même si ce dernier s’est rangé dans le camp du refus des dérogations.

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Le transfert de technologie et d’expertise ne pourra se faire qu’avec la collaboration de l’industrie pharmaceutique mondiale, qui toutefois met les pieds au mur. On ne parle pourtant pas d’expropriation mais de dérogation aux brevets de vaccins, traitements et diagnostics liés exclusivement au Covid-19 et sur une période limitée. A court, moyen et long termes, la protection de la propriété intellectuelle reste un gage pour l’innovation.

Mais dans l’immédiat, c’est une solution à l’urgence sanitaire, à l’inégalité des vaccins et, surtout, c’est un gage d’humanité.