ÉDITORIAL. Un «drôle d’été» touristique touche à sa fin. La situation créée par le SARS-CoV-2 a donné un coup de pouce inattendu à la cohésion sociale avec des échanges sans précédent entre communautés linguistiques. Aux acteurs économiques de savoir en profiter désormais

Il y a ces clients alémaniques croisés, masqués, un peu partout dans les supermarchés romands. Ces nuées de randonneurs rencontrés sur un tronçon des 65 000 kilomètres d’itinéraires balisés en Suisse. Il y a, plus simplement, ce garçon de 10 ans qui dit fièrement avoir traversé 13 cantons durant ses vacances.
Bien sûr, il ne faudra pas pousser l’audace jusqu’à lui demander d’énumérer les contrées traversées. Mais il est certain que cet été insolite va prendre une place bien particulière dans sa mémoire. La même que celle qu’occupa pendant des décennies l’Expo 64 de Lausanne dans l’esprit des Confédérés: les kilomètres avalés sur un réseau autoroutier en devenir, le célèbre mésoscaphe de Jacques Piccard, la Vallée de la Jeunesse qui fascina toute une génération d’enfants émerveillés.
Qui aurait pensé, cinquante-six ans plus tard, qu’un mystérieux virus venu d’Asie allait incidemment accomplir ce que les plus brillants politiciens n’auraient même pas imaginé en rêve: donner à la cohésion nationale un élan aussi inattendu que bienvenu?
Il ne faut bien sûr pas surestimer l’impact qu’aura sur la durée ce drôle d’été. Celui-ci aura néanmoins fabriqué des souvenirs helvétiques chez de nombreux Romands, Alémaniques et Tessinois, révélé aussi une minorité romanche cachée dans des vallées enchanteresses.
Mais, à la faveur de cet été pandémique, c’est aussi entre les acteurs touristiques et la population helvétique qu’un rendez-vous inédit s’est produit. Les partenaires en sont au stade des préliminaires. Comme dans toute relation amoureuse, ils vont devoir s’investir pour entretenir la petite flamme qui a jailli cette année.
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Rapport qualité-prix insatisfaisant, sens de l’accueil discutable… les traditionnelles critiques adressées aux hôteliers ou aux restaurateurs n’ont en effet pas non plus manqué. Qu’elles soient justifiées ou non, les «marchands de vacances» ne doivent pas les occulter. Ils ont tout à gagner à transformer l’essai pour fidéliser cette nouvelle clientèle. A court terme, parce que les voyages internationaux ne reprendront pas avant de nombreux mois. A plus longue échéance aussi, car le tourisme de proximité est moins dépendant de critères géopolitiques ou sanitaires.
Dans certaines régions, les villes en premier lieu, certains établissements souffrent terriblement. Malgré tout, ce qui aurait pu devenir un été maudit s’est plutôt transformé en aubaine providentielle pour le tourisme suisse. A lui maintenant de se surpasser pour transformer une petite idylle de vacances en relation durable et prospère.
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